C’est un don de Dieu qu’une femme silencieuse.

« C’est un don de Dieu qu’une femme silencieuse. » Le livre de l’Ecclésiastique.

« Si la parole est déterminante dans la construction de la réalité, ceux qui contrôlent la parole contrôlent aussi la réalité. » Corinne Monnet.

 Les féministes soutiennent que la parole d’un homme pèse plus lourd que celle d’une femme. Les misogynes que les femmes sont « bavardes ».

 Je voudrais réfléchir avec vous aux rapports entre genre et expression.

 

 Pour cela, je vous propose de nous appuyer sur une étude de Corinne Monnet publiée en 1988 dans la revue Nouvelles Questions Féministes, très pertinente quoique un peu ancienne, que je vous joins en espérant que vous ne vous contenterez pas du résumé que j’en ferai.

 

 Je vais d’abord présenter les concepts que Corinne Monnet a créé pour analyser les jeux de pouvoir dans une conversation. Ces concepts permettent de décrypter notre quotidien. Ensuite, viendront quelques chiffres (très peu, mais si le sujet vous intéresse, l’étude est beaucoup moins laconique sur ce point). Ces chiffres révèlent de surprenantes inégalités dans cette occupation ô combien anodine : la conversation.

 

Car l’ennemi le plus dangereux du féminisme, ce n’est pas le patriarcat. C’est l’illusion de l’égalité. Et si je vous demande, en toute sincérité : « vous sentez-vous discriminée quand vous parlez avec des amis ou des collègues ? », je gage que la majorité d’entre vous répondront « Non ! » d’un ton ferme et convaincu. J’en étais persuadée, moi aussi.

 

 

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√ Etude de Corinne Monnet au Format pdf  ou Classique .

 « Contrairement à l’impression première que l’on a, la conversation n’est pas une activité à laquelle on se livre spontanément ou inconsciemment. Il s’agit d’une activité structurée, ne serait-ce que par son ouverture, ses séquences et sa fermeture, et elle a besoin d’être gérée par les participant-e-s. »

 LISTE DES CONCEPTS :

         La longueur des contributions ;

         Les chevauchements : deux personnes prennent la parole en même temps, à un moment de transition possible. C’est une erreur de réglage entre les tours, un dysfonctionnement du système ;

         Les interruptions : une personne prend la parole alors que l’interlocuteur précédent n’a pas fini son énoncé. C’est une violation des procédures de tours, une rupture d’égalité ;

         Les réponses minimales retardées : tout narrateur a besoin d’une participation minimale de son auditeur pour soutenir son discours. Ces participations (répéter un fragment de phrase, hocher la tête, émettre une onomatopée) sont nécessaires pour valider la participation passive de l’auditeur : il écoute et il comprend. Quand elles sont absentes ou retardées, ça perturbe le narrateur, qui s’interrompt et se tait, ou s’affole (débit plus rapide, répétitions, élocution hasardeuse…) ;

         Les récupérations d’énoncé : le fait, après un chevauchement ou une interruption, de reprendre l’énoncé qu’on n’a pas pu prononcer. Il s’agit d’une défense de son droit à la parole ;

         Le choix des sujets conversationnels : chaque interlocuteur propose des sujets, des ouvertures. Certains seront suivis, la majorité abandonnés ;

         Les sanctions : geste d’impatience, intonation irritée, remarques acerbes, plaisanteries douteuses, dénigrement… A l’extrême, ces sanctions rappellent à l’ordre celui ou celle qui enfreint les règles tacites du dialogue…

 

QUELQUES CHIFFRES (le détail des expériences figure dans l’étude) :

         durée moyenne d’une intervention féminine dans un dialogue avec un homme : 3 à 10 secondes ; …d’une intervention masculine : 10 à 17 secondes ;

         dans 96% des cas, ce sont les hommes qui interrompent leur interlocutrice ;

         62% des femmes tombent dans le silence après 3 types de stratégies conversationnelles : les chevauchements, les interruptions et les réponses minimales retardées…

 

L’étude conclut à une insécurité marquée des femmes dans le dialogue mixte, qui les relèguent au rôle d’« assistantes », chargée de soutenir la parole masculine en occultant la leur. Pour les hommes, l’étude démontre que les stratégies employées sont des stratégies de domination, et qu’elles sont conscientes.

 

 

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√ Mon commentaire

Alors reprenons. Vous êtes en train de parler à un homme, ou à un groupe d’individuEs composé d’hommes et de femmes.

 

LONGUEUR DES CONTRIBUTIONS. Vous est-il arrivé de trouver que votre interlocuteur monopolisait la parole ? Avez-vous parfois l’impression que certaines femmes « font tapisserie » ?

 

CHEVAUCHEMENTS. Quand vous débutez un énoncé en même temps qu’autrui, avez-vous tendance à faire un geste gracieux pour indiquer à l’autre de s’exprimer ? Même question pour les hommes de votre entourage.

 

INTERRUPTIONS, REPRISES D’ENONCE et SILENCES. Quand on vous interrompt, refusez-vous de laisser la parole à autrui ? Si vous le laisser parler, reprenez-vous votre énoncé au prochain tour ? Si vous coupez la parole à autrui, reprenez-vous SON énoncé une fois votre idée exprimée ? Même question pour les hommes de votre entourage.

 

CHOIX DES SUJETS CONVERSATIONNELS. Qui lance les sujets de conversation (dans chaque milieu que vous fréquentez : travail, amis, famille…) ? Y a-t-il des personnes dont les sujets de conversation sont systématiquement accueillis ? Des personnes dont on boude souvent les tentatives pour réorienter la conversation ?

 

SANCTIONS. Vous a-t-on déjà reproché d’être bavarde (fût-ce sous forme de plaisanterie) ? Connaissez-vous des gens réellement envahissants, dans la conversation, qu’on ne rappelle jamais à l’ordre ? Vous est-il arrivé de sentir de l’hostilité, de l’irritation chez votre interlocuteur parce que vous vous exprimiez trop à son goût ?

 

Après avoir répondu à ces questions, pensez-vous toujours que la conversation est une activité spontanée, anarchique, qui n’obéit à aucune règle tacite ? Que tous les interlocuteurs sont égaux dans la conversation ? Si non, y a-t-il pour vous des similitudes chez les personnes en situation d’infériorité ? Si oui, parmi les nombreuses corrélations auxquelles on peut penser (confiance en soi, position hiérarchique, etc.), pensez-vous que le genre ait une influence ?

 

Question bonus : croyez-vous que les stratégies conversationnelles sont toujours inconscientes ? Ou pensez-vous qu’il existe une minorité de personnes qui utilisent sciemment ces stratégies pour dominer un dialogue ? Pensez-vous que collectivement, ces stratégies peuvent avoir un impact sur la faculté d’un groupe à se faire entendre ?

 

√ Petite astuce

Je me livre de temps en temps à un exercice arithmétique. Je sélectionne un concept – disons les interruptions – je me tais, et j’écoute des personnes discuter. Je fais mentalement (voire sur papier ou PC si les circonstances s’y prêtent) 2 colonnes : hommes, femmes. Et je compte.

 

Ainsi, en cours, les garçons prenaient en moyenne la parole 3 fois plus souvent que les filles. Et ça, ça ne date pas de 30 ans : c’était l’année dernière, en classe préparatoire pour préparer le concours d’entrée à l’école d’avocate.

 

Ce chiffrage permet d’objectiver un ressenti. Non, une féministe qui dit que les hommes monopolisent la parole n’est pas paranoïaque, regardez : j’ai compté, dans ce thread, si 80% des intervenantEs sont des femmes, elles n’ont écrit que 20% des messages. Non, une féministe qui dit que la parole d’un homme a plus de poids que celle d’une femme n’est pas frustrée, regardez : j’ai compté, il y a 2 fois plus de réponses aux posts masculins qu’aux posts féminins. Et là, il est tout de suite plus difficile de contester votre propos. (Cet exemple est fictif, mais on pourrait s’amuser à faire ce genre de statistiques sur notre beau forum !)

 

22 Comments

  • sandrine
    12 février 2010

    Bonjour et merci pour ce billet !
    je vais vous recommander à mes contacts,
    c’est passionnant pour la féministe, femme, que je suis, qui cherche toujours les bons arguments, calmes et sereins à l’appui de ses dires…

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  • Janik
    12 février 2010

    Excellent post, qui tombe dans des préoccupations qui m’habitent beaucoup. Il est important que de plus en plus de personnes soient conscientisées de ces pratiques.

    Ainsi que de leur impact.

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  • Tilti
    12 février 2010

    1/ Quand vous dites  » Les féministes soutiennent que la parole d’un homme pèse plus lourd que celle d’une femme. Les misogynes que les femmes sont « bavardes ».  » , d’entrée vous fausser le débat :

    – vous opposez féministe à mysogine : bizarre

    – vous placez la femme en situation de victime car « elle considère que la parole de l’homme pèse plus lourd » sous-entendu que la sienen ne vaut rien

    2/ votre analyse est personnelle, rien n’en démontre la pertinance

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  • Stéphanie
    12 février 2010

    @Lula

    Pourquoi une féministe devrait-elle s’interdire de pratiquer le métier de son choix parcequ’elle « prouverait » supposément davantage son féminisme en pratiquant un métier traditionnellement masculin?

    C’est comme reprocher à une féministe enceinte de ne pas se faire avorter sous prétexte qu’elle est pour le droit à l’avortement…

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  • Marie-Anne
    12 février 2010

    @ Sabrina
    Très bon billet, en effet. Je suis assez d’accord avec les conclusions que tu tires de ton article. Par contre, je crois que les femmes aussi ont des attitudes de domination dans la discussion. Les techniques de monopole du crachoir sont plus flagrantes de la part des hommes dans un contexte mixte, mais dans un contexte non-mixte, le langage de la domination se fait entendre aussi de la part des femmes.

    C’est un super bon sujet à élaborer, cela dit.

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  • Stéphanie
    13 février 2010

    Lorsque j’étais petite, j’observais beaucoup et comme j’étais timide, je parlais peu. J’avais remarqué que dans ma famille, lorsqu’un groupe mixte d’adultes discutait, il y avait très souvent 2 sujets de conversation. Les femmes parlaient entre elles d’un sujet et les hommes parlaient entre eux d’un autre. Ça ne se mélangeait pas souvent, j’avais l’impression de voir deux pièces de théâtre qui seraient jouées simultanément.

    Ne manifestant aucun intéret pour les questions d’ordre domestiques prisées par mes tantes ni pour les sujets dont aimaient parler mes oncles (généralement des anecdotes qui ne m’intéressaient pas vraiment), je profitais des sujets « sociaux » pour sortir de ma coquille. Au fil des années, je pris de l’assurance, m’amusant à « m’introduire » dans une conversation entre hommes pour ensuite me lancer 5 minutes après dans une concersation entre femmes.

    Je parvins même à quelques reprises à faire en sorte que tout le monde m’écoute, ce qui est un tour de force dans une famille où tout le monde parle fort et en même temps! 🙂 C’est peut-être parce que dans ma famille, les gens ne parlent pas fort pour dominer, c’est plus une habitude. Je n’ai donc jamais eu l’impression qu’il fallait que je sois agressive pour me faire entendre. Remarquez, on ne parlait pas de féminisme.

    J’aurais peut-être dû initier une révolution de cuisine lorsque les femmes faisaient la vaisselle en causant popotte pendant que les hommes discutaient au salon! 🙂

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  • Imace
    13 février 2010

    @ Stéphanie : derrière une habitude se cache toujours un mécanisme. Dans votre famille, il est probable qu’on parle fort par émulation ; c’est-à-dire que les gens haussent la voix pour se faire entendre dans un contexte où le « droit à la parole » semble devoir se conquérir.

    Il n’y a pas que le genre qui altère la façon de participer à une conversation. J’avais comparé notamment les us dans un milieu d’ingénieurEs et celles dans ma famille (donc 1 à 2 générations au-dessus). Les ingénieurEs utilisaient un vocabulaire très pauvre, des phrases courtes, avalaient leurs mots et se coupaient sans cesse la parole. Dans ma famille, au contraire, certains partaient dans de longs monologues prononcés lentement et les discussions étaient assez larvées.

    Il n’y a pas un bon modèle et un mauvais (pour des questions d’âge, je suis plus à l’aise avec les ingés ceci dit). Seulement, pour qu’il y ait égalité entre les intervenantEs, il faut que touTEs utilisent les mêmes codes. Or, entre les genres, il y a une vraie répartition des tâches.

    @ Marie-Anne : le billet se voulait visiblement ancré dans une optique féministe. Etait-il utile qu’il précise qu’au niveau des individuEs, y’a de méchantes femmes et de gentils hommes ? Qu’entre hommes et entre femmes, il existe aussi des systèmes de domination ?

    Il me semble que pour étudier un système (le patriarcat), il faut délimiter le questionnement, en excluant à la fois l’étude des autres systèmes de domination qui s’imbriquent dedans et les variations individuelles qui sont de peu d’intérêts.

    Par ailleurs, il me semble que l’auteure du billet ne forme aucune conclusion, elle se contente de poser des questions. Les seules thèses du billet renvoient à l’étude de Corinne Monnet dont elle fournit le lien. Donc je veux bien que vous précisiez avec quelle « conclusion » du billet vous êtes d’accord, je n’ai pas compris à quoi vous faisiez référence.

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  • gouzzi
    13 février 2010

    Sabrina,

    je ne comprends pas le but de votre intervention ? nous convaincre que l’on atteindra l’égalité parfaite quand femmes et hommes tenteront de s’accaparer le temps de parole avec le même acharnement ? quand femmes et hommes se couperont la parole sans aucun respect ?

    dans ma petite vie, j’ai souvent vu des impolis monopoliser la parole : c’était indifféremment des hommes, des femmes, et ça aurait été des chats ou des chiens que ça n’aurait rien changé.

    l’impolitesse n’a pas de sexe.

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  • Marie-Anne
    13 février 2010

    @Imace
    Je n’ai pas été précise, en effet ! Je rectifie aussitôt le tir. Par expérience dans les milieux féministes, je constate qu’il existe aussi des tactiques de domination dans la discussion. Ce que je voulais dire, c’est que j’identifie aussi les tactiques énumérées plus haut dans le billet de Sabrina chez les femmes, et ce, même dans un contexte non-mixte. Je sais très bien que ce billet était écrit dans une perspective féministe. Je connais le document de Corinne Monnet depuis un bon bout de temps déjà.

    La parole n’est pas anarchique, elle est codée, voilà la conclusion avec laquelle je suis d’accord. Le genre influe notre appropriation de la parole, j’en suis certaine, pour m’être livrée à plusieurs expériences du type de l’exercice d’arithmétique de Sabrina. Mais il est vrai qu’elle lance plus de questions et qu’elle ne fait pas explicitement de conclusion. Peut-être en ai-je lu à tort à travers les lignes. Ainsi, je suis peut-être plus d’accord avec les conclusions de Corinne Monnet qu’avec Sabrina..

    Cela dit, je crois qu’à même les groupes de femmes et les groupes féministes peut s’instaurer des systèmes de domination de la parole, ne serait-ce qu’à cause des particularités/personnalités de chacun.e.s. La prise de parole ne va pas de soi pour tout le monde, c’est un exercice qui peut être fluide pour certain.e.s et difficile pour d’autres. Il est bon de voir aussi quelles attitudes nous-mêmes adoptons lors de nos présences dans des groupes. Par exemple, j’ai trouvé, il y a quelques temps,que j’avais moi-même certaines attitudes d’appropriation de la parole dans des occasions de groupe. Et dans ma famille, la parole est aussi «conquise», un peu comme dans l’intervention de Stéphanie. Et j’ai déjà transposé ces attitudes-là de conquête en contexte féministe..Ce qui m’a fait prendre conscience que même chez les féministes, certaines attitudes patriarcales sont profondément ancrées dans nos habitudes. Cette prise de conscience personnelle m’a aidée par la suite à identifier chez les autres ces mêmes attitudes.

    Voilà, je pense que les «variations individuelles», dans des pratiques quotidiennes telle que la conversation, peuvent s’avérer intéressantes à analyser. Toutefois, je comprends que ces nuances particulières peuvent peut-être nuire à l’analyse générale du système «patriarcat», comme vous dites. Je suis en désaccord avec le fait qu’il faut exclure l’étude des autres systèmes de dominations et ses variantes si l’on veut venir à bout de la domination entière. Par exemple, en tant que femme blanche, j’ai des privilèges de blanche, par rapport à une femme noire. C’est une domination imbriquée à même la domination du patriarcat sur les femmes en général.

    Mais peut-être que ma nuance n’était pas pertinente dans ce débat. Je ne sais pas.

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  • Marie-Anne
    13 février 2010

    @Imace
    Ai-je répondu à ta question ?

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  • Imace
    13 février 2010

    @ Marie-Anne : oui, vous avez bien fait de développer. Je vous réponds plus longuement demain !

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  • jules
    19 février 2010

    @Gouzzi (en espérant que c’est un homme)

    juste pour interrompre Imace et Marie-Anne dont la conversation commence à devenir intéressante et permettre en plus aux statistiques sur ce post de refléter un peu mieux la réalité par maints ailleurs.

    Je m’excuse d’avance (of course) de ne pas pouvoir faire plus long pour être moins bref, je me contente donc du minimum en vous laissant généreusement vous exprimer sans monopoliser plus de lignes d’affichage dans la conversation sur ce sujet passionnant (vraiment, vraiment sans ironie – lol).

    merci de m’avoir lu avec tout ce respect suffisant.

    Super Julien

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  • Imace
    19 février 2010

    ô combien pertinent, ce dernier commentaire !^^ Il m’évoque irrésistiblement cette phrase de George Eliot : « Béni soit l’homme qui, n’ayant rien à dire, s’abstient d’en administrer la preuve en paroles ! »

    Au fait, sur un forum féministe, il est légitime que l’essentiel de la parole soit dévolue aux féministes… Qui se trouvent être majoritairement des femmes. Bizarre qu’on ait besoin de le rappeler, ça semble tellement couler de source…

    @ Marie-Anne :
    Alors, je suis d’accord avec vous pour ce qui est de l’imbrication des systèmes de domination. Ils sont nombreux, complexes, et affectent plus ou moins les individus en fonction de leur résistance ou de leur passivité.

    Mon idée, c’est que pour étudier un système, il faut supprimer toutes les variables autres que celle qu’on étudie (c’est le principe du groupe témoin dans une expérience scientifique). Sinon, on piétine, on ne prouve rien. Donc d’un point de vue social, quand on essaie de comprendre les dynamique des masses, on ne peut pas s’appesantir sur l’individuel.

    Ensuite, d’un point de vue d’épanouissement personnel, la dynamique globale s’efface derrière les variations individuelles. Le genre n’est d’ailleurs probablement pas le facteur ayant le plus de poids dans le rapport à la parole !

    En gros, les deux analyses sont intéressantes, mais elles poursuivent deux objectifs différents.

    @ Gouzzi : vous sautez directement au remède, sans vous attarder au constat. Ma foi, pourquoi pas. Il est évident cependant que le remède que vous proposez (l’escalade dans l’impolitesse) est le pire qui soit. C’est un peu comme si vous disiez « ne dénoncez pas la publicité sexiste, à moins que vous ne vouliez que les hommes soient aussi réifiés que les femmes sur les encarts publicitaires ! ». Certes non, les féministes ne veulent en général pas de l’harmonisation par le bas.

    Le constat fait par l’auteure du billet s’appuie sur des études, le votre sur des impressions. Vous comprendrez donc que je prête plus de foi à Sabrina quand elle pointe une corrélation entre ce que vous appelez l’impolitesse, et qu’elle appelle une stratégie de domination, et le genre.

    Une fois ce constat fait, on peut effectivement y chercher des solutions. Se soutenir entre filles, se donner mutuellement la parole, refuser de prêter attention à l’impoli qui coupe la parole, reprendre l’énoncé de la personne qui a été interrompue… En fait, des solutions qui permettent de défendre son droit (ou celui des autres) tout en respectant les règles de la politesse, il y en a plein !

    Dès lors, je ne comprends absolument pas votre objection.

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  • jules
    19 février 2010

    @Imace
    cela faisait presque une semaine que j’attendais votre réponse à Marie-Anne, merci et bonne continuation 😉

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  • Imace
    19 février 2010

    @ Jules : si vous êtes sincère (i.e. intéressé par le sujet), méfiez-vous, j’avais compris votre commentaire précédent comme étant sarcastique… Et j’y ai répondu à l’avenant.

    Rappelez-vous que sur un forum, on n’a pas accès à l’intonation pour déterminer ce que veut vraiment dire la personne qui s’exprime, d’où de nombreux malentendus.

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  • Marie-Anne
    24 février 2010

    @Imace,
    Merci de ta réponse et les précisions. Les échanges sont toujours très intéressants et pertinents…jusqu’à ce que certain.e.s viennent mettre leur grain de sel superflu ?
    En tout cas ! On se recroise sur d’autres billets-discussion 😉

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  • Ray
    21 avril 2010

    Je ne sais pas qui parle le mieux ou qui parle le plus ou le plus fort mais une chose est sure c’est que beaucoup d’entre nous aiment parler d’eux-même. Il y a un manque énorme d’écoute car nous avons pratiqué notre parlé bien plus que notre écoute. L’écoute c’est spécial et rare en ce monde. Cependant la personne qui ne parle que d’elle pendant des heures ou qui fait du¨ dumping¨ c’est-à-dire déverser tous ses problèmes sur nous, c’est vraiment épuisant. Ce serait tellement agréable si on pouvait mieux équilibrer nos conversations. Une phase parlé, une phase écoute le tout enveloppé de respect, de non-jugement et surtout de sujets autre que la possession ou le rêve de posséder des biens matériels, des gadgets etc. ou de parler des nouvelles acquisitions matérielles.
    L’étude de Corinne Monnet disant entre autre que les hommes interrompent souvent les femmes et que c’est une façon de nous dominer etc, C’est possible mais il y a aussi que l’homme est un grand enfant et les sujets dont nous discutons nous les femmes ne les intéressent souvent pas beaucoup ou un peu mais avec modération. Ils n’aiment pas qu’on s’éternise. De plus ils aiment s’amuser, donc si nous sommes trop sérieuses on perd leur attention. On dirait des ados souvent. Tous ces problèmes viennent peut-être aussi du fait que de par sa nature l’homme était (je ne sais si c’est encore vrai) plus un bâtisseur qu’un parleur, il passait à l’action alors que nous étions reconnues comme étant des planificatrices, des idéalistes et nous aimons beaucoup en jaser ce qui ne fait peut-être pas parti de leur culture masculine.
    Pour parler beaucoup, oui les hommes parlent beaucoup quand ils sont à l’aise entre eux, quand ils veulent impressionner, quand ils veulent se défendre, ils deviennent des machines à parler eux aussi.
    Peu importe nos raisons, ou leurs raisons, il reste que je suis contre la ¨diarrhée verbale¨svp vous abstenir mesdames et messieurs.
    Un autre fait que j’ai constaté et qui est des plus malheureux est que depuis qu’on insiste et qu’on encourage les gens à communiquer car comme on dit : dans le temps les gens ne parlaient pas de leurs problèmes, de leurs sentiments etc, je me rends compte que de plus en plus de familles sont désunies. Il semble que l’on parle plus ouvertement de tout mais malheureusement il semble aussi qu’on en dise peut-être trop ou que c’est mal dit, qui sait. Depuis que les gens s’expriment, d’énormes fossés se sont creusés pour toutes sortes de raisons. Désaccords religieux, politiques, personnels, sentimentaux etc etc se sont érigés entre nous. Combien de fois j’ai entendu cette phrase : Oh! Moi je suis le mouton noir de ma famille, je ne suis pas comme eux, je ne me sens pas à ma place etc
    Quelle leçon en retiendrons-nous?

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  • Valérie
    21 avril 2010

    Bonjour Ray, je suis bien d’accord avec l’ensemble de vos propos. Nous manquons souvent d’écoute les unes envers les autres. Par contre, je mettrais un bémol ici :  »C’est possible mais il y a aussi que l’homme est un grand enfant et les sujets dont nous discutons nous les femmes ne les intéressent souvent pas beaucoup ou un peu mais avec modération. »

    Je crois qu’il ne faut pas défendre des préjugés à l’aide d’autres préjugés. Je connais des hommes et des femmes qui n’appréhendent pas la vie avec sérieux, et d’autres qui sont responsables et s’investissent beaucoup dans ce qu’ils sont, dans ce qu’ils font. Je constate aussi qu’il existe une foule de sujets féminins très futiles : ouvrez simplement un magazine. Celui près de moi (un clin d’oeil) parle de mode, des chirurgies plastiques du futur (qui deviendront bientôt un petit plaisir de la vie, semble-t-il), de la ‘chick lit’, et on y trouve un article sur les relations : ‘mission impossible : sauver les hommes!’. Hahaha.

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  • Imace
    22 avril 2010

    @ Valérie : nous avons la même opinion sur les magazines féminins :p Ils sont à mon avis aussi nocif pour l’intelligence que la cigarette l’est pour les poumons !

    De toutes façons, toutes les théories qui relient à une « nature » masculine ou féminine les comportements sociaux que l’on décrypte relèvent de la superstition pure.

    La parole est une activité sociale entre toutes, c’est la technique fondamentale d’entrée en relation avec autrui. Elle fait l’objet d’un apprentissage dans des lieux variés (école, maison, média, etc.). Cet apprentissage diffère selon le sexe (et plein d’autres facteurs), et les individuEs « piochent » une fois sociabiliséEs dans une gamme de techniques pour intégrer, participer… ou dominer une conversation.

    C’est bien de rester conscientE, quand on converse, de la mise en oeuvre de ces techniques, afin le cas échéant d’éviter certains déséquilibres comme l’accaparement de la parole par une personne ou l’exclusion d’une autre…

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  • Jean-François
    22 avril 2010

    « De toutes façons, toutes les théories qui relient à une “nature” masculine ou féminine les comportements sociaux que l’on décrypte relèvent de la superstition pure.  »
    L’assertion est un peu cavalière, voir la deuxième question de l’interview du lien ci-dessous. Je ne crois pas qu’on ne fasse QUE « devenir femme », on l’est quand même un peu à la base. On devrait d’ailleurs dire « devenir homme », puisqu’il me semble que le développement du foetus est féminin par défaut, et masculin sous l’effet d’hormones seulement (mais je ne m’avance pas plus: mes cours de biologie sont un peu loin!)
    http://www.scienceshumaines.com/index.php?lg=fr&id_article=25077

    Cela dit, ça ne fait pas tout, bien sûr, et les observations faites dans l’article sont très vraies. La plupart du temps, il me semble en effet plus facile de couper la parole pour un homme que pour une femme. Le problème est sans doute plus général, cependant: le genre n’est qu’un facteur parmi d’autres dont il faut tenir compte dans les rapports de force des conversations. L’initiative dans une conversation tient, me semble-t-il, surtout à l’énergie dégagée (par la gestuelle, la force de la voix, les intonations…). Être une femme mais avoir « du coffre » permet ainsi de limiter l’effet du genre.

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  • Murie
    31 décembre 2013

    Bonjour et merci pour votre billet, qui date mais dont la pertinence est toujours d’actualité et pour longtemps encore il me semble !
    Il est effectivement très juste de rappeler cette étude – voire à chaque année – car rien ne change réellement ! Encore aujourd’hui, et c’est loin d’être la première fois lors d’une conversation depuis que je suis rentrée en France, le jeune homme serveur du Coffee Shop n’arrêtait pas d’étaler son savoir en écoutant à peine ce que je pouvais moi aussi lui apprendre – donc échange très limité (pour un premier contact c’est mal barré!) et sa compagne avait justement ce rôle de soutien du « petit coq français » que l’on finit par voir comme merdeux épais…car je tiens tête, je m’obstine et il a fini par essayer de m’ignorer en servant des clients mais je l’ai rattrapé au final; égo rassuré mais usant à la longue, grrrr ! 🙁 dommage !
    Voici le lien vers une étude britannique qui démontre que les hommes (les français en premier, tiens donc !) sont plus vantards que les femmes :

    http://sante-medecine.commentcamarche.net/news/108995-une-etude-demontre-que-les-hommes-sont-plus-vantards-que-les-femmes

    Franchement, j’ai vraiment énormément de misère à supporter les hommes français pour beaucoup puants de machisme, et les femmes françaises… s’écrasent (séduction oblige!)! Pour le comble, c’est moi-même qui apparaissait arrogante et… chieuse comme ils disent !
    Heureusement qu’il y a internet…
    Alors très bonne continuation pour cette nouvelle année ! Lâchez pas la patate 🙂

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  • Murie
    3 janvier 2014

    Bonjour et merci pour votre billet, qui date mais dont la pertinence est toujours d’actualité et pour longtemps encore il me semble !
    Il est effectivement très juste de rappeler cette étude – voire à chaque année – car rien ne change réellement ! Encore aujourd’hui, et c’est loin d’être la première fois lors d’une conversation depuis que je suis rentrée en France, le jeune homme serveur du Coffee Shop n’arrêtait pas d’étaler son savoir en écoutant à peine ce que je pouvais moi aussi lui apprendre – donc échange très limité (pour un premier contact c’est mal barré!) et sa compagne avait justement ce rôle de soutien du « petit coq français » que l’on finit par voir comme merdeux épais…car je tiens tête, je m’obstine et il a fini par essayer de m’ignorer en servant des clients mais je l’ai rattrapé au final; égo rassuré mais usant à la longue, grrrr ! 🙁 dommage !
    Voici le lien vers une étude britannique qui démontre que les hommes (les français en premier, tiens donc !) sont plus vantards que les femmes :

    http://sante-medecine.commentcamarche.net/news/108995-une-etude-demontre-que-les-hommes-sont-plus-vantards-que-les-femmes

    Franchement, j’ai vraiment énormément de misère à supporter les hommes français pour beaucoup puants de machisme, et les femmes françaises… s’écrasent (séduction oblige!)! Pour le comble, c’est moi-même qui apparaissait arrogante et… chieuse comme ils disent !
    Heureusement qu’il y a internet…

    Alors très bonne continuation pour cette nouvelle année ! Lâchez pas la patate 🙂

    [Commentaire hors-sujet? Abusif? Spam?]

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