Le Devoir s’abaisse (et déçoit)

Avec un étrange sens du timing, le Devoir fait aujourd’hui (veille du 8 mars) la promotion d’un livre pourtant paru il y a plus d’un an : Re-Thinking Men. Heroes, Villains and Victims, de Anthony Synnott, qui « glorifie les hommes, qui en ont bien besoin ». Et en première page, encore.

Évidemment, j’attendrai d’avoir lu le livre pour en critiquer le contenu. Il faut cependant souligner quelques énormités parues dans l’entrevue du Devoir.  Par exemple, quand Monsieur Synnott affirme que les hommes constituent 73% des victimes d’homicides, il laisse de côté le fait que les « homicideurs » soient, en majorité, eux aussi des hommes.  Il affirme également que dans 20% des cas d’homicides conjugaux les hommes sont la victime et les femmes, la coupable. Combien de ces 20% sont des cas de légitime défense, monsieur Synnott?

Je ne dis pas qu’un tel livre n’a pas sa raison d’être. C’est un point de vue répandu (et très à la mode) que les hommes soient « autant » victimes de violence conjugale que les femmes. Je trouve simplement que c’est un manque de tact flagrant de la part du Devoir que de promouvoir un livre anti-féministe la veille du 8 mars. Ça sent la recherche de polémique cheap. Je suis déçue de voir un journal que j’estime s’y abaisser.

8 Comments

  • Martin Dufresne
    7 mars 2011

    Bien dit. D’ailleurs, cette attention suspecte portée à la « condition » des hommes à l’occasion du 8 mars ou du 6 décembre est devenue si prévisible qu’on peut véritablement parler d’un « marronnier » (« Article de circonstance publié traditionnellement à certaines dates » – http://www.cnrtl.fr/definition/marronnier)

    Février étant reconnu depuis 35 ans comme le Mois de l’Histoire des Noirs, on pourrait adresser au Devoir une supplique pour qu’il se penche dans 11 mois sur la « condition blanche », en faisant vibrer la corde de la « complémentarité ».

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  • Agusti
    7 mars 2011

    Franchement, pourquoi cette réaction para-hystérique chaque fois que quelqu’un se penche au Québec sur la réalité des hommes, leurs problèmes et leurs souffrances ? Pourquoi de façon automatique on y voit un attaque contre les femmes et les féministes ? Devons-nous nous excuser et / ou demander la permission aux féministes, hommes ou femmes, pour parler des hommes ? C’est quoi cette inquisition qui au fond est profondément patriarcale ? Quand on vit la vie par procuration d’une idéologie, on fini par voir des ennemis partout. Manque de tact par la date de publication de l’entrevue. Si le livre vient de sortir et il n’est pas anti-féministe (mais oui on peut être a-féministe ou simplement non-féministe sans pour autant être anti-féministe), pourquoi il faudrait laisser passer la date du 8 mars avant d’en parler.
    Supposer qu’une partie du 20% de femmes homicides le sont en raison de légitime défense est vraiment n’importe quoi. Encore une fois c’est la croyance que la femme ne peut pas être aussi le siège du Mal, qu’elle est par nature victime et angelicale. si j’étais une femme, je me sentirais vraiment insultée par l’ineptie de tels propos

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  • Martin Dufresne
    7 mars 2011

    Mon cher, vous n’aviez pas besoin de préciser que vous n’êtes pas une femme: votre référence à l' »hystérie » en disait déjà long… Pour votre gouverne, le bouquin de l’ex-Jésuite Anthony Synnott n’est pas récent justement – il date d’octobre 2009 – et son propos est clairement antiféministe.

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  • Marie-Anne
    7 mars 2011

    @Agusti
    Dans quelle mesure vous sentez-vous justifié de traiter ce billet de « para-hystérique » ? On a le droit de donner notre opinion sans que l’on se fasse traiter d’hystérique, non ? Manque de tact ? Sûrement ! Seulement un manque de tact ? On peut questionner ce choix éditorial à la veille de la Journée internationale des femmes de façon rationnelle. À ce que je sache, nulle part dans le billet ci-haut il n’est question d’adopter une point de vue « angélique » ni victimisant. D’ailleurs, il est explicitement mention dans le billet que le livre discuté dans l’article du Devoir a sa raison d’être et que, sans l’avoir lu, il est difficile d’émettre un avis sur son contenu. La question du billet est plutôt : pourquoi parler d’un tel livre (longtemps après sa sortie) exactement la veille du 8 mars ? On peut se poser cette question sans problème et je ne vois pas où votre intervention veut en venir.

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  • Valérie
    7 mars 2011

    Et, évidemment, à la veille du huit mars, il y avait à TVA Éric Duhaime et Martineau qui discutaient : «le féminisme a-t-il encore une place au Québec». Ces deux personnes ont maintes fois fait preuve de leur ignorance à propos de plusieurs sujets. Je n’ai donc pas eu le courage de les écouter. Je vous le signale, néanmoins.

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  • Martin Dufresne
    8 mars 2011

    Deux hommes de droite à qui l’on confie une discussion sur l’opportunité du mouvement de libération des femmes!… C’est exactement comme si on payait deux cagoulards du Ku Klux Klan pour discourir sur les droits des Noir-es le jour de la fête de Martin Luther King…

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  • alois
    8 mars 2011

    J’avoue avoir tiqué sur l’expression  » manque de tact « .

    j’aimerais qu’on me caractérise ce manque de tact, qu’on me décrive les mécanismes qui conduisent à cette conclusion.

    pour ma part, le manque de tact s’appliquerait plutôt à une relation de proximité voire intimiste.

    Là on parle d’un débat de société où ce genre de considérations ne s’appliquent pas à mon sens. on peut parler d’opportunisme, de provocation dans la promotion de ce livre certes mais manque de tact je ne vois pas.

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  • Martin Dufresne
    8 mars 2011

    Un autre exemple de la part bien juteuse que els médias continuent à faire à la réaction antiféministe en profitant du 8 mars: Pierre Maisonneuve annonce ce matin que son émission de ce midi – Première chaîne de Radio-Canada – sera consacrée à la division entre les femmes qui disent que cette fête est justifiée par les violences que « l’on » continue à infliger aux femmes et « celles qui disent qu’on n’a plus besoin de ça! » Tentative pathétique d’aller chercher des auditeurs et auditrices en attisant un faux débat au lieu de s’ateler aux vrais problèmes.

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