Je suis féministe

Je suis féministe parce que je suis une femme. Oui je suis féministe et non je ne suis pas lesbienne, ni poilue, ni mal baisée. Oui je suis féministe et j’aime les hommes. Oui je suis féministe et j’ai de l’humour (même si ma technique de racontage de blagues n’est pas encore au point).

Je suis féministe parce que je suis une femme et parce que je suis en colère.

En colère contre les DSK de la planète, contre ces hommes et ces femmes au vocabulaire limité qui confondent harcèlement et séduction.

Contre les hommes et femmes qui pensent toujours qu’une personne violée ou tabassée l’a certainement cherché.

Contre la violence faite aux femmes, la violence physique, morale, psychologique, émotionnelle et économique.

Contre les clichés qui continuent à affirmer qu’il vaut mieux être belle et tais toi.

Contre la corrélation récurrente entre femme et sexualité.

Contre les coutumes enracinées, contre les traditions culturelles et familiales qui continuent à considérer qu’une fille est différente ou moins bien qu’un garçon.

Contre les hommes et les femmes qui pensent que, à travail égal, salaire égal est une utopie. Contre les inégalités face aux richesses.

Contre les hommes et femmes qui pensent que la place d’une femme est à la maison ou qu’une femme ne peut pas tout avoir.

Je suis féministe, ce n’est pas un gros mot.

Je sais aussi que les femmes et les hommes ne se mettent pas dans des cases. Qu’il y a des hommes féministes, je le sais parce que j’en connais. Et qu’il y a des femmes machos, je le sais parce que j’en connais.

Je sais qu’être féministe est un combat mais aussi un état d’esprit. C’est refuser les lieux communs, c’est oser l’ouvrir, c’est penser différemment et lutter aussi contre ses propres préjugés et idées reçues.

Je sais ce que je dois aux autres femmes, célèbres ou pas, qui ont lutté pour le droit des femmes, droit à l’éducation, droit de vote, droit à l’autonomie, droit à disposer de son corps.

Je sais aussi ce que je dois aux hommes, célèbres ou pas, qui ont épousé et compris la cause des femmes et continuent à lutter pour et avec elles.

Je sais aussi que nous vivons actuellement dans une société qui est beaucoup plus divisée que nous le pensons en terme de sexualité, genre, “race”, richesse, classe sociale. Une société beaucoup plus divisée que la plupart des gens sont prêts à admettre. Je sais donc qu’être féministe c’est être consciente de ces divisions, toutes les divisions, et lutter pour les éradiquer.

Enfin j’espère qu’un jour je ne serai plus féministe

À propos des femmes qui disent: Je ne suis pas féministe, Johanna B., 93 ans, répond: ça me fait le même effet qu’un juif antisémite. (dans le documentaire de Veronika Minder, Le Bal des chattes sauvages, 2006).

Le féminisme n’a jamais tué personne, le machisme tue tous les jours. Benoîte Groult

Journée internationale de la lutte contre les violences faites aux femmes

Par Murielle
Publié le 25 novembre 2011 sur La Bayonnaise

16 Comments

  • Marie-Élaine
    17 janvier 2012

    J’ai bien aimé ton texte, Murielle.

    Un élément de ton intro m’interpelle particulièrement: tu as choisi d’y désamorcer plusieurs mythes entourant le féminisme. Notamment, tu remets en cause l’idée reçue comme quoi nous sommes toutes anti-hommes. J’apprécie que tu reconnaisses le fait que des hommes ont été et peuvent être de superbes alliés féministes – je suis du même avis. Du même coup, je suis tannée de devoir « préciser » ça à chaque fois que je me positionne comme féministe dans des milieux non militants (ou simplement non féministes). Pourquoi ce désir de rassurer tout le monde que nous ne sommes pas d’incurables misandristes? Pourquoi ne pas simplement vivre notre féminisme tel qu’on l’entend, sans avoir à continuellement l’expliquer, l’encadrer, le défendre?

    Encore plus qu’un monde où je n’aurais plus besoin de me dire féministe, j’ai simplement envie d’un monde où je pourrais m’étiqueter comme telle sans avoir à me justifier.

    J’aimerais entendre les autres lectrices.teurs là-dessus…

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  • Marie-Josée
    17 janvier 2012

    Merci, ton texte me fait du bien ce soir…
    Cela me fait du bien de me sentir moins seule avec ma perception de ce que pourraient être les rapports humains, moins seule avec ma colère.

    Je suis enseignante au collégial, j’enseigne le développement de la personne et je dois encore « lutter » pour ne pas avoir à enseigner: l’homme est comme-ci, la femme est comme ça.
    Je suis maman et je dois encore lutter pour permettre à mes enfants (j’ai un garçon et une fille) d’être ce qu’ils sont (sans nécessairement se conformer aux stéréotypes).
    Je suis monoparentale et je dois lutter contre l’opinion publique qui dit que, comme je suis une femme, c’est normal que je doive m’en sortir seule, que c’est normal qu’il ait quitté, que « sa » punition c’est la pension qu’il verse pour ses enfants…
    Je suis fatiguée d’avoir l’impression de faire un « coming out » chaque fois que je dis que je suis féministe (et de lire parfois en sous-titre: on comprend maintenant sa monoparentalité).
    Je suis tannée, les premiers signes de l’âge apparaissant, de me faire suggérer que je devrais me teindre les cheveux pour cacher le blanc ou entretenir mieux ma peau pour moins rider.
    J’ai été élevée en me faisant dire que les gars et les filles avaient les mêmes droits, les mêmes devoirs… Je me rends compte que c’est beaucoup moins vrai quand on devient maman. Alors, même si plusieurs me diront à quel point les hommes se sont améliorer au niveau de l’implication parental, je pense que les luttes féministes sont loin d’être terminées.

    Mon texte est émotif… je suis en colère moi aussi… et je pense que je peux être en colère sans être une hystérique, être sous l’effet des hormones ou avoir perdu le contrôle de mes émotions.

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  • Karelle l'africaine
    18 janvier 2012

    Merci pour ce superbe texte qui parle à toute celle qui lutte pour la cause des femmes!je suis d’autant plus interpellé par ce texte car je suis une féministe qui vit dans un continent où la cause de la femme est un perpétuel combat et dont les valeurs traditionnelles et klk fois modernistes mériteraient d’être reformées en faveur de la gente féminines
    l’AFRIQUE!
    un continent ds lequel avoir 30ans pour une femme,pas marié,pas d’enfts est un sacrilège,où, partager des discussions,des debats politiques,sociaux avec des hommes est pointé d’un regard de femmes « légères » ou « frivoles »
    encore merci…

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  • Murielle
    18 janvier 2012

    Merci beaucoup pour vos commentaires. J’ai écrit cela dans un moment d’irritation, de colère et parce que je ne veux pas me résigner, parce que on ne doit pas se résigner! Bon courage à toutes

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  • Elisabeth
    20 janvier 2012

    Quel bon article! Bravo! J’aurais aimé l’écrire. Ça représente tout à fait ce que je pense. Je le partage!

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  • Sonia
    24 janvier 2012

    Carrément d’accord !

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  • Sonia
    24 janvier 2012

    Carrément d’accord ! Limite un gos mot, mais quant on voit le discours de « certaines » féministes, on peut comprendre …

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  • Emma#2
    24 janvier 2012

    TAnnée des clichés « je suis féministe, mais pas lesbienne, pas poilue, pas mal baisée »…
    Si on est féministe, lesbienne, poilue, on a moins de crédibilité?!?
    Je comprends où vous voulez en venir par un tel raisonnement, mais à moment donné on génère d’autres préjugés, on les entretient,
    Bref je savais pas que LA féministe 2012 devait être glabre, jolie, drôle, hétéro.
    Tout à coup ça me semble correspondre à un diktat, celui actuel, celui qu’on voit dans les pubs, justement…

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    • Lise Rose
      28 janvier 2012

      Tu as raison. En fait, pourquoi se JUSTIFIER d’être féministe? Pourquoi sentir le besoin de rassurer aussi (oui, je suis féministe, mais pas si, pas ça)? Comme si d’être «glabre, jolie, drôle, hétéro» augmentait l’écoute et nous rendait plus crédible. On ne fait pas un show d’humour quand on dit JE SUIS FÉMINISTE, on se positionne et d’autres vont nous marginaliser. Donc, on lutte contre un système bien huilé tout en demeurant à l’INTÉRIEUR de ce système.

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    • Murielle
      22 juin 2012

      Oops. je vois tout à fait ce que vous voulez dire et moi même je fais du cliché sans le savoir. Mea culpa! Je ne veux à aucun moment me justifier d’être féministe mais je réagissais aux blagues (gentillettes et taquines) de mes connaissances et amis quand je démarre au quart de tour dès que l’on critique une femme politique ou qu’on fait une remarque un peu sexiste, etc 🙂
      Je suis certes hétéro mais je pense être loin du cliché glabre, jolie et drôle. Je ne suis pas belle, je ne suis pas super intelligente, y’a beaucoup plus rigolote que moi et je sens même du vagin parfois (http://labayonnaise.com/2012/06/20/tu-sens-du-vagin/).
      Mon coup de colère est une réaction. Simplement ça. Je ne pense absolument pas avoir fait de l’humour dans cet article. Mais merci pour la réaction. 🙂

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  • Imace
    25 janvier 2012

    Pour tuer le temps, j’avais écrit sur un forum de psychologie un commentaire suite à un énième « guide de séduction » fondé sur la propagation des clichés et stéréotypes sexués. Je m’étais juré de ne jamais lire les réponses. Et puis trois mois après, je fais la bêtise de cliquer dessus.

    La première réponse commençait par « Je sais pas où t’as lu ces conneries, mais bon une femme crache du lait par les tétons si t’étais pas au courant, donc elle est biologiquement faite pour nourrir le chiard un petit moment après l’avoir expulsé de son vagin. »

    Je ne sais même pas ce que le type cherchait à prouver par la suite, je me suis abstenue de lire. Mais j’en ai assez.

    Non, l’essentialisme n’est pas anodin. C’est un bien joli mot. Ça veut pourtant simplement dire misogynie. TOUTE PERSONNE qui pense que les femmes ou les hommes ont des qualités spécifiques EST sexiste. Il n’y a pas à faire dans la nuance.

    On ne dit plus en France que les Noirs sont plus sportifs, ont l’oreille musicale, mais sont fainéants et dissipés. On devrait passer un savon à toute personne se permettant de prétendre que « la » femme est ceci ou cela.

    Dans un jeu en ligne, aujourd’hui, on parlait d’un personnage que je joue, une druide capable de se métamorphoser en ours. J’ai demandé au chef de guilde pourquoi il utilisait toujours le mot « petite » pour qualifier les femmes, alors que ma « petite » druide pèse entre 3 et 5 tonnes, selon qu’on se place avant ou après son hibernation. Un abruti a répondu « parce qu’elles sont inférieures ».

    C’est une litote de dire que cette réflexion n’est pas drôle. Elle est d’une bêtise consternante (le type est effectivement très bas du plafond), ET elle est misogyne.

    Dans la semaine qui précède, un de mes collaborateurs au boulot m’a dit qu’il faudrait que j’apprenne la cuisine pour « quand j’aurais des enfants ». Je lui ai demandé pourquoi il utilisait « quand » et pas « si ». Et j’ai eu droit à un long couplet essentialiste.

    Trois exemples en 15 jours. Honnêtement, je N’ai PAS ENVIE de prétendre être gentille, patiente, douce, d’expliquer avec flegme et pédagogie le féminisme. J’ai envie d’humilier et d’engueuler les connards misogynes qui gâchent mon quotidien. Qui se permettent de dire des choses qui devraient les ostraciser immédiatement. Je vis dans un pays viscéralement misogyne. J’ai honte des français.

    Voilà, j’avais besoin d’évacuer ma colère.

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  • Berenice
    26 janvier 2012

    Félicitation Imace ! Je suis aussi française et je partage votre sentiment.
    Moi j’avais expliqué à un de mes amis que j’étais politisée (c-à-d que je m’intéresse à la politique et que j’estime pouvoir en parler) il m’a répondu : « ce n’est pas possible ». Puis il a « corrigé » en m’expliquant que ce n’était pas normal, parce que les femmes ne sont pas, naturellement portées sur la réflexion, elles sont plus dans le domaine des émotions… Si l’on traduit, cela veut dire que les femmes sont un peu comme les chiens, dans un monde de sensations, mais pas faites pour réfléchir. Elles « ressentent » plus qu’elles ne pensent. Le même ami m’avait également prêté le livre d’Alain Soral, sociologie du dragueur. Et je vous jure que c’est le livre le plus haineux et misogyne que j’ai jamais lu. Ma seule consolation est que l’auteur est très nettement un pervers. Je suis en psycho et le diagnostique m’a sauté au visage. Tous les éléments sont là. Cependant, ce livre abominable a été réédité 5 fois, car il a un certain succès. Je trouve qu’en France, les propos incitant à la haine des femmes ne sont pas sanctionnés, alors que les propos racistes le sont, et il y avait une loi qui avait été proposée qui se proposait de sanctionner plus durement les propos homophobes que les propos misogynes… Bref, je ne me souviens plus des détails, mais le fait est que la volonté affichée était de ne pas sanctionner, ou le moins possible, les propos misogynes. Le livre dont je parle précédemment fait par exemple l’apologie du viol. Je ne trouve pas normal que l’on ne puisse pas porté plainte et le faire retirer de la vente. Ainsi que coller une énorme amende à son auteur.
    Pour les sites de coaching en séduction, c’est abominable. On a 300 pages sur comment manipuler, mentir, « encadrer » les femmes que l’on veut mettre dans son lit, avec des références à la psychologie sociale et à la psychologie tout court. Avec des techniques telles que l’hypnose et autre délires. Notons tout de même que les références théoriques sont très faibles, cependant, ça reste à vomir. Et tout cela est justifié comme suit : c’est parce que les femmes sont manipulatrices, c’est donc pour se « défendre »… Le site dont je parle s’appelle French Touch Seduction. Encore des français.
    Bref, il y a beaucoup de boulot.

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  • Aline Pagé
    11 mars 2012

    J’ai pris plaisir à lire tout ce qui précède. J’avais justement cette impression que les Françaises avaient pris du recul dans les rapports
    hommes-femmes. Nous aussi au Québec dans une certaine mesure. Comme si
    les droits acquis par et pour les femmes étaient devenus des « ça va de soi » pour la jeune génération. Ça fait plaisir de constater que les luttes se poursuivent toujours, par le biais des jeunes féministes très au fait des rapports sociaux de sexe actuels. C’est rafraichissant.

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  • Naïma
    26 juin 2012

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