Le féminisme de Mad Max

 

http://blogs.indiewire.com/thompsononhollywood/10-reasons-why-charlize-theron-in-mad-max-fury-road-is-the-badass-successor-to-aliens-ripley-20150511

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Ce n’est plus un secret pour personne : Hollywood souffre d’un manque cruel de femmes tant devant que derrière l’écran. Les réalisatrices doivent faire face à une discrimination sexiste de la part des hauts dirigeants tandis que les longs métrages centrés sur des personnages féminins représentent une minime fraction des productions proposées.

Il y a quelques semaines, le réalisateur George Miller a ressuscité sa franchise Mad Max en offrant un nouveau volet, Fury Road. Tom Hardy incarne le célèbre héros des années 80 joué originalement par Mel Gibson et Charlize Theron interprète le rôle de Furiosa. Les prémices du film sont simples : Max est capturé par Joe, un homme imposant à la tête d’une communauté où il est roi, où les richesses (lire : l’eau potable) sont confinées à l’élite et à peine distribuées aux moins chanceux, et où les femmes ne lui servent qu’à se reproduire. Lors d’un voyage de routine pour récupérer de l’essence, Furiosa détourne la trajectoire habituelle et se met à dos Joe et son armée qui la pourchassent. À bord de son camion, elle cache cinq de ces femmes et aspire à les libérer.

Depuis la sortie du film, la toile s’est enflammée suite au portrait que le film fait de la condition féminine. D’un côté, le blogueur Aaron Clarey a émis un brûlant pamphlet masculiniste afin de décourager tout spectateur masculin d’aller voir le film, de l’autre les auteures Robin Hitchcock de Bitch Flicks et Jen Yamoto de The Daily Beast ont explosées de rage en répliquant furieusement à ces accusations et en incitant plutôt tous les spectateurs et spectatrices à courir voir le film.

Le billet de Clarey est assez effrayant. Non seulement il réaffirme les normes genrées du masculin et du féminin en avançant que le film n’est plus un spectacle pour les hommes, mais bien une propagande féministe destinée à corrompre les spectateurs. Pour lui, les vraies femmes ont l’air de Sophia Loren et n’ont rien en commun avec Imperator Furiosa. Mais Clarey s’emporte dans son délire lorsqu’il prétend qu’Hollywood est envahi par le féminisme :

The real issue is not whether feminism has infiltrated and co-opted Hollywood, ruining nearly every potentially-good action flick with a forced female character or an unnecessary romance sub-plot to eek out that extra 3 million in female attendees. It has.

Outre l’évident machisme de l’auteur qui donne froid dans le dos, c’est la profonde déconnexion qu’il éprouve face au système qu’il critique et prétend connaître qui déconcerte.

Le personnage joué par Charlize Theron n’effraie en aucun cas les hommes. Bien au contraire, dans Mad Max, Furiosa s’allie à Max et à Nux (Nicholas Hoult), deux figures masculines, pour échapper à Joe. Elle renverse le patriarcat oppressant incarné par l’homme et son armée de soldats. Les femmes de Mad Max sont utilisées, perçues comme de simples vecteurs pour la reproduction – d’enfant de sexe masculin de préférence – et réduites à cette simple fonction. Même si les cinq prisonnières que veut libérer l’héroïne font preuve de courage et de conviction, Furiosa demeure dans une classe à part. Sa férocité, son agilité, sa force, ses aptitudes au combat, sa façon de manier les armes, tout cela avec un bras en moins (le film ne tente d’ailleurs jamais d’expliquer comment elle a perdu son membre), lui confère un statut symbolique puissant. Mais aussi, sa compassion et son humanité transcendent son aspect de prime abord très masculin. À ce titre, la manière dont le personnage est représenté s’approche davantage d’une ambiguïté de genre, d’autant plus qu’elle ne se définit jamais par sa sexualité (ses rapports avec Max demeurent strictement basés sur une idéologie commune malgré une scène de combat très physique entre les deux).

Le féminisme qu’incarne Furiosa dans le film de George Miller n’anéantit pas les hommes. C’est un féminisme inclusif où la réussite et le succès se gagnent par l’entraide et une solidarité fraternelle entre les membres de la communauté. La scène finale où on applaudit la jeune femme qui fait son ascension vers le trône de cette société en témoigne : tout le monde l’emporte avec le féminisme. Les écrits misogynes d’Aaron Clarey – et de plusieurs autres, bien tristement – n’ont aucune raison d’être. Mad Max : Fury Road montre c’est que non seulement le féminisme est prolifique pour une société et une culture, il l’est tout autant pour le septième art.

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