Comment ne pas être complice de l’injustice

Les gens prennent certaines expressions et les utilisent selon ce qui leur convient le mieux. Quand « vivre et laisser vivre » et « tu ne peux pas changer le monde » permettent de se déresponsabiliser.

Pourquoi est-il important de parler, de les reprendre?

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles il faut dénoncer lorsque nous en avons l’occasion. Il est vrai qu’au début, il est difficile de prendre sa place et d’être la personne qui a toujours un mot à dire. C’est ce rôle que les gens craignent vraiment lorsqu’ils disent qu’ils  laissent les autres dans leur ignorance, tant qu’ils ne font de mal à personne. Devenir cette personne qui prend de la place, qui dérange parce qu’elle dit les choses comme elles sont. Le problème c’est qu’il est parfois plus néfaste laisser aller, car quelqu’un qui passe des commentaires misogynes, xénophobes et haineux perpétue des stéréotypes et banalise le sujet. Quand c’est discuté partout, ça devient anodin et normal. D’ailleurs, lorsqu’une opinion est dite comme une affirmation, elle peut sonner comme une vérité pour les autres. La violence du message se transforme, soit en violence psychologique, soit en harcèlement voire même, dans certains cas, en violence physique.

Si nous avons la possibilité d’entendre des propos choquants et de nous dire que la personne est ignorante, c’est que nous en sommes assez détachés pour que cela ne nous affecte. En reprenant la personne, nous diminuons les chances que quelqu’un vivant ces violences à longueur de journée ait à l’entendre, qu’elle ait à rouvrir des plaies, aie honte, etc.

Et si on voyait plus grand?

C’est un phénomène qui s’applique autant à petite qu’à grande échelle. À cet effet, les manifestations et pétitions sont importantes. À plusieurs, nous avons plus d’impact. Lorsqu’il y a eu un soulèvement contre l’austérité, les plus affectés ne pouvaient pas toujours se permettre de prendre congé pour prendre la rue. On ne prend pas congé d’une maladie ou d’un handicap, on ne prend pas congé de notre situation financière ou de notre statut, on ne prend pas congé des injustices. Les manifestations féministes sont importantes, parce que nous avons la chance d’être dans un pays où l’on prône la liberté d’expression. Ça ne veut pas dire qu’on ne doit pas demander plus : tant que l’égalité n’est pas acquise, la lutte est légitime. Pour toutes celles qui ne se possèdent pas elles-mêmes, qui vivent dans des endroits où s’exprimer ou même être soi-même est un acte qui peut nous donner la mort (pour des raisons d’orientation sexuelle, identité du genre, etc).

Comme le dit Desmond Tutu: “Être neutre en situation d’injustice, c’est choisir le coté de l’oppresseur”. Ce qui revient à dire qu’être silencieux, c’est être complice.

Mais c’est juste une blague!

Il y a toujours un fond de vérité derrière les “c’t’une blague”. De vérité selon la personne qui les prononcent, on s’entend! Les plaisanteries sont souvent un moyen de dissimuler des discours qui séparent et excluent un groupe: c’est nous contre les autres. Notre groupe: une nationalité (la nôtre) contre celle des autres, un genre contre les autres, etc. De ce fait, faire une blague sur le stéréotype des noirs qui seraient paresseux par exemple, reviendrait à dire qu’eux ils sont comme ça, contrairement à nous.

 Le danger est qu’on se dise que ce n’est pas si pire, si on est capable d’en rire. Il y a effectivement eu une étude menée par l’Université de Western Carolina qui conclut qu’être exposé à l’humour sexiste abouti à une plus grande tolérance aux sentiments hostiles et la discrimination envers les femmes.

Du coup, oui il y a des ignorants, mais en disant que c’est tant pis pour eux, vous dites tant pis pour l’oppressé. Oui, « vivre et laisser vivre» mais la liberté des uns termine où  celle des autres commence. On ne peut peut-être pas changer le monde mais on peut le rendre plus beau pour certains et il faut en saisir l’opportunité.

Je tiens cependant à préciser qu’il faut respecter ses propres limites et toujours veiller à ne pas parler À LA PLACE d’un autre. Il y a beaucoup de personnes compétentes pour parler et qui de mieux que ceux et celles qui vivent ces réalités? N’hésitez pas à partager des liens, des titres de livres, de vlogs et blogues des personnes concernées. On parle de sexisme? Référez des femmes et non-binaires. De racisme? Référez des personnes racisées. Ne prétendez pas comprendre l’opprimé et écoutez-le plutôt.

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