La légalisation de la prostitution et ses dangers l’autonomie sexuelle
J’avoue que c’est toujours avec soulagement que je constate que je ne suis pas la seule à adopter la position contre la légalisation de la prostitution (voir l’article récent de Stéphanie).
Cette alternative, pour plusieurs raisons, ne me semble pas la meilleure solution au problème de la prostitution, et dans mon humble opinion, compromettrait l’autonomie sexuelle des femmes en général.
Premièrement, quelques distinctions importantes :
Primo : Je suis pour la décriminalisation de la prostitution, au sens où l’État n’entreprendrait plus de poursuites pénales contre les personnes qui se prostituent ou qui « sollicitent » aux fins de se prostituer. Sinon, il me semble, on punit la victime, et non la personne qui l’exploite.
Deuzio : Décriminaliser un acte, ce n’est pas la même chose que de le légaliser.
Prenez l’avortement, par exemple. Décriminalisé au Canada en 1988, mais pas légalisé. Oui, on peut en avoir un sans se faire mettre en prison, mais ouvrez le Code criminel à l’article 287, et c’est encore on the books.
Aussi, la légalisation en tant que tel, c’est la légitimation d’une conduite, c’est le rapatriement d’une pratique donnée dans le cercle de l’ordre public.
Et c’est exactement la ligne qu’il ne faut pas franchir.
Pourquoi ?
Parce que l’échange de contacts sexuels contre rémunération, n’étant plus contraire à l’ordre public, deviendrait un contrat comme un autre, avec, notamment, les conséquences suivantes :
Problème # 1 : On ne peut pas faire un contrat dont l’objet ou la cause est contraire à l’ordre public. Exemple : Le contrat pour faire tuer quelqu’un est nul, invalide. Même chose pour un contrat pour la fourniture de services sexuels contre rémunération. Un tel contrat est nul, il n’existe pas aux yeux de la loi. On ne peut y donner effet, ni en forcer l’exécution si l’autre partie n’exécute pas sa part du marché.
Si on légalise la prostitution, qu’on déclare socialement acceptable d’échanger des actes sexuels contre rémunération, alors il devient possible de forcer la personne qui s’était engagée à fournir les actes en question, via une action les tribunaux, par exemple. Ou à obtenir des dommages si la personne refuse néanmoins de s’exécuter.
Problème # 2 : Les contrats implicites. Sauf quelques rares exceptions, un contrat peut être implicite, non constaté dans un écrit, et même se former sans échange verbal d’aucune sorte. Exemple : Vous achetez un ticket de bus, vous grimpez dans le but, le chauffeur prend votre ticket et vous laisse entrer, vous allez vous asseoir tranquillement jusqu’à destination. Vlan ! Pas un mot d’échangé et vous vous retrouvez bénéficiaire d’un contrat de transport de passager. Bien sûr, il y a des zones grises. Si je laisse mon frère partir avec ma télé, on pourra toujours débattre s’il s’agissait d’un prêt ou d’un don.
Imaginez un monde où la prostitution peut faire l’objet d’un contrat aussi simplement que dans l’exemple précédent avec le ticket de bus.
Toute femme sait très bien qu’il y a une quantité industrielle d’hommes qui prennent un sourire, une conversation amicale ou juste une invitation pour aller prendre un café pour des avances sexuelles, ou encore, qui croient que parce qu’ils vous paient le cinéma, le souper et le retour à la maison en taxi, vous êtes « obligée » de coucher avec eux.
Ouache.
Bien imaginez. Vous êtes effectivement obligée de coucher avec eux parce qu’un contrat implicite de fourniture de services sexuels a été formé et qu’on vous a « rémunérée » en conséquence. Et vous, méchante madame féministe, vous n’avez pas honoré vos obligations contractuelles.
Charmant, quoi. Re-ouache.
Pour pousser la démonstration dans ses recoins absurdes, la Charte québécoise s’appliquerait à un tel contrat. Alors, mesdames, plus questions de discriminer vos « clients » en fonctions de l’âge ou de l’orientation sexuelle. Vous êtes tombée dans l’œil d’un vieux croûton qui pense que vous lui devez quelque chose ? Tant pis pour vous ! Les hommes, ça ne vous intéresse juste pas, parce que vous êtes lesbienne ? Though luck ! Pas de discrimination contre l’homme hétéro macho super moyen, sans aptitude sociale et au Q.I. température pièce.
Farfelu ? Pas tant que ça. L’an dernier, en Allemagne, un vieux riche qui se fait appeler le « Hugh Hefner allemand » a poursuivi en justice une séduisante jeune femme de 19 ans qui – oh mon dieu !- avait accepté quelques verres de sa part mais qui avait par la suite refusé de coucher avec lui, au motif que par sa conduite, elle s’était engagé à coucher avec lui à la fin de la soirée, et que la raison pour laquelle elle s’était soustraite à son « obligation », c’est par discrimination envers son âge avancé.
Définitivement à classer sous « laissez-moi vomir, quelqu’un ».
Tout ce petit préambule légaliste pour en arriver à la question du consentement et de l’autonomie sexuelle. Un contrat de prostitution signifierait que la personne qui fournit les services renonce, lorsqu’on s’engage à la payer, à la faculté de retirer son consentement à l’activité sexuelle envisagée.
Une telle situation dérogerait alors, dans mon humble opinion, à la règle de notre droit criminel qui précise que des contacts sexuels, quand il n’y a pas de consentement, ou que le consentement donné au début de l’activité est retiré en cours de route, constituent une agression sexuelle.
Cet état de fait contredirait également le principe, également reconnu par notre droit criminel, qu’on ne peut pas consentir à l’avance, ni de façon implicite, ni par l’intermédiaire de quelqu’un d’autre, à des contacts sexuels.
(Voir par exemple, R. v. Ashlee, 2006 ABCA 244.)
Aussi, tel que le suggère l’exemple sordide du vieux playboy allemand, ça raviverait ces préjugés tellement tenaces sur le consentement d’une femme à des activités sexuelles, qui incluent, entre autres, les célèbres « Je lui ai payé le cinéma, elle consent », le « Elle a bu de l’alcool, elle consent », le « On sort ensemble, elle consent », sans oublier le « On jase ensemble dans un coin tranquille du bar, elle consent ». Bref, ça irait à l’encontre de plusieurs règles, établies au terme de longues et pénibles batailles sociales, politiques et judiciaires pour faire valoir l’autonomie sexuelle de la femme, qui englobe, notamment, la faculté de consentir aux seules activités sexuelles que l’on choisit, quand on le désire, et avec qui l’on veut, ainsi que le pouvoir de retirer son consentement en cours de route.
C’est aussi bête que le simple fait de pouvoir dire « non » si le gars est trop vieux à notre goût, qu’il a une haleine de cheval ou parce que tient, on n’est juste pas dans le mood.
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Plug éhontée du jour: Si la question du consentement aux contacts sexuels vous intéresse, voici des liens vers des articles pondus il y a quelque temps à ce sujet…
Stéphanie LeBlanc
Bonjour! J’ai adoré votre article qui traite avec grande précision de points légaux auxquels on ne pense jamais! Vos arguments sont excellents et en feront réfléchir plus d’une (et plus d’un , je l’espère!) Ça me fais penser au cas d’une chômeuse Allemande qui était menacée de se faire couper ses prestations sous le motif qu’elle avait refusé un emploi de danseuse nur (avec contact)!
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Catherine
Hum… je me demande si un chômeur – homme – allemand s’est aussi fait couper ses prestations parce qu’il a refusé la job de « danseuse » avec contacts…
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Rachel
Cette page explique clairement la différence entre la légalisation et la décriminalisation de la prostitution, entre autres :
http://www.chezstella.org/stella/?q=node/108
Notez que la grande majorité des groupes de défense des droits des travailleuses du sexe sont contre la légalisation de la prostitution pour plusieurs bonnes raisons, que la page ci-dessus résume rapidement. Le « débat » se fait plutôt autour de la décriminalisation et de la supposée abolition de la prostitution. Je met débat entre guillemets parce que sa qualité est du même ordre que les « débats » entre anti-choix et pro-choix, ou encore entre masculinistes et féministes.
Savez-vous que la prostitution a été décriminalisée en Nouvelle-Zélande? Récemment, un solide rapport a été publié à ce sujet. Il fait un bilan de cette expérience. Celles qui s’intéressent à la question de la prostitution devraient en prendre connaissance :
http://cybersolidaires.typepad.com/ameriques/2008/06/dcriminalisatio.html
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benoit TOUM
je suis heureux de voir que des sites pour la vie existe comme le votre malgré la prolifération des lois permissives. la légalisation de la prostitution reste un danger pour notre monde surtout pour les société africaines. je vous ferai part d’un article prochainement sur cette question
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bbs
La justification de la prostitution est tout à fait logique dans une société propagandisée par les « nozickiens » pour lesquels toute éthique doit être évacuée au profit d’une société capitaliste efficiente et bien huilée, idéale, où chacun est vu comme un concurrent ou une source de profit possible.
Nous sommes dirigés par des banques, des sociétés de publicité, des médias, des producteurs télé et cinéma, des transnationales dont les dirigeants adorent la prostitution car c’est une preuve pour eux que tout s’achète et tout se vend et que les gens après tout sont prèts à se soumettre à n’importe quoi.
Les antiabolitionnistes nient les chiffres du trafic, nient l’abus massif de drogues parmi les prostitués, les maladies, les décès. Une infime minorité prétendument solidaire des prostituées estiment avoir le droit de parler au nom de la masse gigantesque de prostitués sans voix et de toutes les femmes.
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Imace
@ Rachel :
Navrée, mais le lien que vous donnez ne me satisfait pas.
Il y a trois types de politiques concernant la prostitution :
– le réglementarisme (ce que l’article appelle « légalisation ») ;
– le prohibitionnisme (i.e. la répression) ;
– l’abolitionnisme.
Votre article assimile les deux dernières. Ce ne sont pourtant pas du tout les mêmes politiques, que ce soit dans leurs fondements ou dans leurs effets.
En outre, il est assez orienté. Il ne fait notamment aucune différence entre prostitution et proxénétisme, ce que je trouve effarant. Je ne crois pas que ce soit une bonne base de réflexion.
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rholia toog
l’indépendance financière des femmes dans tous les pays, est la clé de voute sociale.
La reconnaissance des taches d’entretien plus connues sous le terme tache domestique;
tache volontaire,
tache non volontaire .
La femme n’a pas le choix de décision lorsque son corps est un siège tel que celui de vaisseau spatial à l’humanité.
Face à la vie son autonomie se développe et elle oeuvre pour assouvir ses besoins et ceux de sa cellule familiale.
L’homme semble immature dans ce processus d’autonomie ,oeuvrer pour lui même et pour les autres c’est complexe; comme si il n’en avait pas fait l’expérience dans son corps .
Il se comporte comme un assisté,il faut tout faire à sa place d’où son incapacité à entendre et accepter le NON dans l’adversité.
C’est sous une forme d’animalité qu’il agit.
Et les femmes doivent persister dans ce champs intellectuel où elles sont dangeureusement absente pour l’humanité.
Chacune doit et peut si elle le veut modifier les comportements archaiques qui scultent notre monde ,degré aprés degré on pourra observer le climat qui y régne ensuite.
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