Ainsi suis-je
Étant souvent prise de questionnements et réflexions existentielles qui pourraient s’expliquer par mon intérêt et mes études en philosophie, j’en suis venue à un niveau critique de critique assez étonnant. Qui plus est, d’auto-critique. Et je n’épargne personne. Ainsi, à la lecture de ce blogue, j’ai remarqué une constante dans les articles : l’interrogation sur la conciliation du féminisme avec la vie de tous les jours.
Peut-on être mère et féministe ? Maquilleuse et féministe ? Mariée et féministe ? Cette tension entre nos identités de femmes ( nos carrières, nos amours, nos enfants, nos vies quoi !) et nos engagements féministes est révélatrice de l’état d’esprit des féministes de notre génération, ou du moins de celui des participantes de ce blogue. On se pose la question suivante : peut-on être les deux à la fois ?
Voilà. Je veux attirer votre attention spécifiquement sur ce questionnement-là, cette tension que je lis un peu partout, et non sur les réponses, parce que pour moi il est clair et net qu’on peut très bien dealer avec notre féminisme à tous les jours sans problème. Pourquoi y a-t-il ce questionnement lancinant dans nos réflexions ? Qu’est-ce que signifie cette tension entre nos personnalités et nos engagements féministes ? Pourquoi ne peut-on pas s’affirmer pleinement féministe, tout simplement ? Avons-nous tant besoin de nous justifier ? De plus, est-ce seulement se nommer féministes qui nous rend effectivement féministes ? Est-ce que, dans ce climat néolibéral, ce ressac de l’antiféminisme et la montée de la droite conservatrice, nous avons peur d’être féministes ? Est-ce que c’est politically correct de l’être ? Qu’est ce que la question « doit -on faire son coming out féministe ? » implique ?
Je vous propose la définition du féminisme suivante, que je trouve assez juste : « Il s’agit d’une prise de conscience d’abord individuelle, puis ensuite collective, suivie d’une révolte contre l’arrangement des rapports de sexe et la position subordonnée que les femmes y occupent dans une société donnée, à un moment donné de son histoire.Il s’agit aussi d’une lutte pour changer ces rapports et cette situation. » (Louise Toupin)
C’est une prise de conscience, un point de non retour, une analyse dont on ne peut se débarasser ensuite. Une fois sensibilisé.e à la condition des femmes, on ne peut plus y être indifférent.e. Si le féminisme est une prise de conscience individuelle, sociale et politique, pourquoi j’ai l’impression qu’on ne veut pas assumer l’héritage féministe que nous ont légués nos mères, nos tantes et nos grand-mères ?
Pourquoi cette distanciation systématique du féminisme de la part des femmes de nos jours ? Serait-ce parce que l’aspect collectif s’efface loin derrière l’individu.e, entraînant ainsi un désintéressement global pour des engagements sociaux ou politiques ? Que les engagements que nous prenons sont plus envers nous-mêmes et nos réseaux qu’envers la société dans laquelle nous évoluons ? Pourquoi ai-je l’impression qu’aujourd’hui, pour certain.e.s, la prise de conscience féministe s’arrête à l’étape «conscience individuelle» de la définition proposée plus haut ? Peut-on (doit-on?) relativiser le féminisme à nos individualités ou relativiser nos individualités à une valeur plus commune telle que le féminisme ? C’est à dire, est-ce que mes actions, que je nomme «féministes» le sont de facto ? Il y a-t-il des critères du féminisme comme dénominateur commun ? Argh. Je pourrais continuer encore !
Voilà, merci de m’avoir suivi dans mes réflexions féministo-philosophiques… Mais la question la plus fondamentale, et à laquelle j’aimerai être éclairée, c’est : Pourquoi avons-nous honte de celles qui ont brûlé leurs soutien-gorge ?
Stéphanie L
Bonjour! Pour moi, ça toujours été clair que rien de ce qui constitue notre vie(carrière, maternité, amour, amitié) ne constitue un obstacle au féminisme. Le problème est qu’il y a encore et toujours un véritable tabou autour du mot « féminisme », autant chez les femmes que chez les hommes. C’est pourquoi autant de femmes hésitent à faire le « coming out » que je mentionnais dans mon texte sur les réactions des hommes de l’entourage. Bien des femmes préfèrent ne pas en parler de peut de devoir se farcir des questions stupides et des clichés usés.
Bien sûr, il est vrai que le fait d’être féminisme ne devrait pas se résumer à le crier à haute voix. Je préfère voir une femme vivre en accord avec les valeurs féministes tout en reniant le terme que d’en voir une autre adopter un féminisme de façade et ne jamais sortir de sa zone de confort pour confronter réellement le sexisme. Peut-être n’auront-nous plus besoins du mot « féminisme » le jour ou les valeurs de ce mouvement seront universellement acceptées comme quelque chose qui va de soi (je sais, je rêve…) En terminant, l’épisode du brûlage de soutient-gorge serait un mythe, d’après ce que j’ai entendu dire.
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Rozenn
Dites, je m’interroge justement sur ce « mythe » des soutient-gorges brûlés. J’ai moi aussi entendu dire que ce serait un mythe, ou que ça ne concernerait que 2 ou 3 femmes dans une manif.
Est-ce que quelqu’un aurait plus d’infos à ce sujet?
Pourquoi cette image est-elle encore si forte dans l’imaginaire de touTEs quand on parle de féminisme?
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Stéphanie
Je viens de trouver le texte suivant (en anglais) sur l’origine de ce mythe:
http://www.snopes.com/history/american/burnbra.asp
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Marie-Anne
En effet, c’est un mythe, mais un mythe fort commode pour les détracteurs des féministes.
Pourtant, je trouve que cette image est symbolique, je ne peux pas dire qu’on doit la rejetter… Mais elle n’est pas emblématique du tout du mouvement féministe, parce qu’il est multiple et complexe…
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