Une réponse radicale au féminisme pop

Criticism and self-criticism are the way in which individuals united by common goals can consciously utilize their differences and limitations, in order to accelerate their positive advance.

– James and Grace Lee Boggs, Revolution and Evolution in the 20th Century

La lettre Léa Clermont-Dion et le féminisme relooké, publiée la semaine dernière, a lancé une série de débats sur les médias sociaux. Même si certaines réserves ont été exprimées quant à la forme de la lettre, nous croyons qu’elle a tout de même permis de verbaliser plusieurs malaises quant au féminisme pop dans les médias de masse et médias sociaux. Le présent texte, écrit et signé notamment par plusieurs féministes radicales [1], se veut une contribution théorique et collective dans le débat en cours.

Nous souhaitons d’abord rappeler l’importance de la critique au sein du mouvement féministe, en opposition à une vision polie qui tente de le présenter comme un front uni, exempt de désaccords. Le féminisme a toujours été marqué par des débats qui permettaient souvent de remettre en question des privilèges, qu’ils soient liés à la couleur de la peau, à la classe sociale, au niveau de scolarité, à l’âge, aux capacités physiques ou cognitives ou à l’orientation sexuelle. Il n’a jamais été question de «vrai» ou de «faux» féminisme : ces critiques ont plutôt permis de rendre le mouvement féministe plus fort et plus représentatif de la diversité de femmes qui le composaient. En tant que militantes, nous souhaitons que l’on reconnaisse notre droit à la colère, au dissensus et à la critique sans que l’on nous infantilise ou que l’on nous accuse de faire une scène.

Si le féminisme était un concours de personnalité, Léa Clermont-Dion serait probablement une candidate de choix. Toutefois, le féminisme ne saurait être une compétition de popularité. Le féminisme est une lutte ; il ne peut pas s’inscrire dans le consensus, ni se domestiquer. À plusieurs endroits, Léa Clermont-Dion s’est réclamée du féminisme radical. Or, traiter de l’apparence physique dans un magazine tel que Châtelaine ne constitue pas une action radicale, ni même une remise en question du patriarcat. Les discours des féministes qui ont accès aux grandes tribunes, à l’instar de Léa Clermont-Dion, s’inscrivent dans un féminisme de consensus et accusent rarement ce qui est considéré comme le coeur du problème par de nombreuses féministes et militantes, soit le système patriarcal. Il semble que Léa Clermont-Dion se défende de chaque remise en question de son travail, de chaque critique faite à son égard en appelant à la mauvaise foi de ses détracteur-trice-s et au soutien de sa communauté de partisan-e-s. Le problème avec ces réactions défensives, dont la réponse de Véronique Robert au billet de Céline Hequet, c’est qu’elles se concentrent uniquement sur les effets bénéfiques du travail de Léa Clermont-Dion, et invalident aux féministes toute possibilité de critique et de débat sur les pratiques d’un féminisme pop. De plus, le fait de se porter à la protection d’une autre femme avec une attitude maternante, plutôt que de la laisser répondre aux critiques, revient selon nous à de l’infantilisation. Le travail de Léa Clermont-Dion constitue, à notre avis, une version édulcorée des enjeux féministes actuels. Ses critiques se situent toujours à la surface du problème et les solutions qu’elle propose sont bien superficielles : que les femmes continuent à servir de porte-valises à l’émission Le Banquier, tant qu’il y règne une «diversité corporelle». L’utilisation de la tribune qui lui est attribuée dans les médias ne pourrait-elle pas être questionnée? Nous affirmons qu’en matière de réflexion et de lutte, il n’y a pas d’intouchables. Toutes et tous sont appelé-e-s au débat d’idées pour ouvrir les perspectives des féminismes.photoshop

Les médias de masse québécois mettent à l’avant-plan un féminisme de confort et libéral qui porte la voix de femmes blanches, francophones, relativement aisées, presque toutes hétérosexuelles et qui, malgré leur malaise par rapport aux normes de beauté, y correspondent ou s’y soumettent tout de même. Les femmes racisées invitées parmi celles-là sont souvent celles qui appuient un nationalisme québécois, et, dans les derniers mois, celles qui ont défendu le projet de Charte des «valeurs québécoises». Elles ont une place en tant que femmes instrumentalisées à certaines fins plutôt qu’un rôle indépendant et prédominant. Pourtant, il existe au Québec plusieurs féminismes, tels que matérialiste, queer ou postcolonial, qui s’inscrivent dans un courant plus radical. Toutefois, les militantes de ces tendances ne sont peu ou pas représentées dans nos médias, parfois par choix politique (par exemple, dans le cas des matérialistes qui remettent en question le système capitaliste auquel les médias de masse participent), mais aussi par exclusion. Les féministes libérales qui prennent la parole dans l’espace public jouissent de privilèges liés à leur statut qu’elles ne reconnaissent pas toujours et critiquent encore moins.

Les grandes campagnes nationales ne remettent pas en question le patriarcat, ni l’économie d’exploitation, ni l’usage néolibéral que les médias font des vedettes qu’elles fabriquent pour mieux les instrumentaliser. Elles se concentrent plutôt sur des enjeux touchant les femmes dans la sphère privée et les relations hétérosexuelles entre les hommes et les femmes. Nous pouvons prendre pour exemples la Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée (CHIC) initiée par Léa Clermont-Dion ainsi que La Journée sans maquillage. On met l’accent sur l’empowerment par l’acceptation de la beauté dite naturelle et sur l’image corporelle. Ces campagnes peuvent sembler bénéfiques, mais elles mettent toujours en scène des femmes considérées comme belles au naturel et, au final, l’objectif ultime est de prouver sa beauté aussi sans maquillage. Ces campagnes ne représentent que les aspects socialement acceptés du féminisme. Elles sont souvent une prise de conscience, un point d’entrée dans l’univers du féminisme, mais on ne saurait s’y limiter. Doit-on vraiment réaffirmer que les femmes qui ne se reconnaissent pas dans le féminisme véhiculé dans les grands médias sont légitimes de participer aux débats touchant les pratiques du féminisme pop? L’article de Véronique Robert remet pourtant cela en question.

Alors que Léa Clermont-Dion publiait son premier livre la semaine dernière, un écrit à mi-chemin entre l’essai et l’autobiographie, plusieurs se sont réjoui-e-s du fait qu’un livre mainstream osait réfléchir sur les standards de beauté et sur les conséquences de ces derniers sur les femmes et les hommes. Malheureusement, ce ne fut que tentative, car La revanche des moches porte très mal son nom. L’auteure explique que «face à cette société aliénante, tout le monde est moche», mais ce «tout-le-monde» est très limité pour elle. En effet, on ne retrouve aucune personne racisée, aucune personne avec un surplus de poids (outre une ex-obèse), aucune personne avec des limitations physiques ou ne correspondant pas auxdits standards de beauté que l’auteure dit vouloir combattre. En fait, la diversité des corps ne fait pas partie de l’essai de Léa Clermont-Dion. Comment peut-on prétendre venger les moches si on ne les inclut pas? Qui plus est, les seules personnes interviewées sont des femmes et des hommes bien connu-e-s du public : des vedettes. Vouloir briser le culte de la personnalité en ne présentant que la réalité de personnes célèbres est un essai bien pauvre. Et alors qu’elle se décrit comme féministe radicale, elle ne mentionne le patriarcat qu’une seule fois, sur les 300 pages, comme l’une des causes des multiples problèmes.

En tant que féministes, nous n’échappons pas à notre mise en compétition comme femmes, comme militantes, comme étudiantes, comme travailleuses… Celles qui brillent deviennent aussitôt des modèles à suivre : si elles le peuvent, pourquoi pas vous? Or, n’est-ce pas à nous, féministes radicales, de rompre avec ce culte de la performance ainsi qu’avec la conformité aux canons de beauté féminine les plus éculés? Aux petites initiatives qui font bonne figure et aux rassemblements de vedettes, nous préférons les projets à long terme qui permettent aux femmes, même inconnues du grand public, de prendre la parole et de gagner du pouvoir sur leurs vies. Quant à l’état du féminisme au Québec, nous affirmons qu’un féminisme restreint aux problématiques des femmes québécoises, qui ne dépasse pas les limites nationales pour s’intéresser aux problématiques et mécanismes d’oppression d’autres femmes, ne peut être un féminisme inclusif qui reconnaît les différences de classe, d’héritage culturel, religieux et d’origine. Cela est pourtant impératif.

Le féminisme mainstream met de l’avant l’égalité entre les femmes et les hommes, mais évince une problématique tout aussi cruciale, sinon plus : l’égalité entre les femmes de différents horizons. Il est essentiel que les féministes québécoises reconnaissent les privilèges dont elles jouissent ainsi que l’oppression de milliers d’autres femmes. Toutes n’ont pas la place de choix qui est offerte à certaines dans les médias. C’est pourquoi nous nous désolons de constater que les rares femmes qui ont l’occasion de porter la voix du féminisme dans les médias de masse se complaisent à n’aborder que certains aspects sans oser s’attaquer à ce qui est, à notre avis, la racine du problème. Peut-être est-ce dans le but de plaire, possiblement par peur de représailles et de critiques, ou simplement par insouciance. Cependant, il ne faut pas oublier qu’un féminisme qui ne dérange pas ne transforme absolument rien. Nous ne cherchons pas à plaire, encore moins à éviter le ressac antiféministe, nous n’obéissons pas et nous nous attaquerons au patriarcat tant qu’il le faudra.


[1] Le féminisme radical apparaît à la fin des années 1960 (1969 au Québec, avec le Front de libération des femmes) et présente l’oppression des femmes comme socialement construite par le patriarcat. Ce courant ne se limite pas à une égalité formelle dans les droits civiques, mais tente d’éradiquer les rapports de domination dans la sphère privée : violences sexuelles, contrôle économique, travail domestique, etc.

Signataires

Marie-Luce Audet

Isabelle Baez

Audrey Bellemare Buist

Stéphanie Benoit-Huneault

Annabelle Berthiaume

Élisa Besner-Ali

Fannie Boisvert St-Louis

Caroline Bourbonnais

Vanessa Bourgeois

Mylène Brunet

Anne-Marie Buisson

Marie-Anne Casselot

Marie Soleil Chrétien

Marie-Eve Coderre

Marie-Ève Desroches

Toula Drimonis

Sandra Dubé

Maha Farah El Mir

Amélie Faubert

Marie-Julie Flagothier

Virginie Fournier

Geneviève Gariépy

Vanessa Gauthier Vela

Laurence Gabrielle Geoffrion

Ines Guennaoui

Geneviève Guernier

Sarah Harper

Jennifer Hazel

Émilie E. Joly

Gabriella Kinté

Naoual Laaroussi

Ariane Lapierre

Myriam Leduc

Valérie Lépine

Mathilde Létourneau

Marie-Pier Long

Laurence Olivier

Aurélie Paquet

Florianne Philippe-Beauchamp

Jeanne Reynolds

Camille Robert

Fannie Rochefort

Justine Rousse-Lamarre

Stéphanie Roussel

Shanie Roy

Katherine Ruault

Jackie San

Marie-Pier Sansregret

Rosemarie Savignac

Éléonore Schreiber

Isabelle Séguin-Ethier

Tanya St-Jean

Pascale Thériault

Catherine Valombre

Marilyne Veilleux

Nastassia Williams

Alexandra Zawadzki-Turcotte

Sabrina Zennia

 

33 Comments

  • Vanessa
    9 avril 2014

    Excellente réponse, ça me donne envie d’ajouter mon nom aux signataires! Je suis ravie d’enfin lire une critique sur le féminisme populaire qui me rendait mal à l’aise, sans trop savoir pourquoi. Au point ou je me demandaise si j’étais parfois une « mauvaise féministe », alors que j’étais plutôt insatisfaite des discours ambiants. Bravo!

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  • Duc C. Nguyen
    9 avril 2014

    J’aimerais juste citer Jennifer Baumgardner, de l’excellent texte de Catherine https://jesuisfeministe.com/?p=7523

    « […] il est moins important pour vous de savoir si Sarah Palin et Lady Gaga sont féministes, et qu’il est beaucoup plus important de savoir si vous, vous l’êtes. Et si la réponse est oui, comment ferez-vous pour canaliser votre pouvoir, vos habiletés et vos valeurs pour faire un monde où chaque personne compte? De quoi votre féminisme aura l’air? »

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    • Fannie B
      9 avril 2014

      Je crois qu’on essaie de réfléchir plus profondément que ça. On ne dit pas que Léa n’est pas une féministe. On réfléchit sur la place que les médias donnent à certaines féministes et pas à d’autres et comment celles-ci exploitent cette tribune.

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  • Soso
    9 avril 2014

    Comment montrer en un commentaire qu’on a absolument rien saisi du texte. Chapeau Hugo Mortier.

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  • camille
    9 avril 2014

    Moi je trouve la réponse excellente. Bravo.

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  • Mathilde
    9 avril 2014

    Je comprends tout à fait votre réponse. Mais personnellement, j’ai un petit bémol: Léa Clermont-Dion est probablement maladroite comme féministe, mais elle a au moins le mérite de vouloir l’être. Pourquoi pas tout simplement voir qui est féministe plutôt que d’essayer de voir qui défend le mieux le féminisme? On semble avoir affaire à du féminisme d’exclusion ici.

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    • Camille
      9 avril 2014

      Relisez la lettre : Il n’est pas question de vrai ou de faux féminisme. Le texte se situe plutôt contre l’exclusion de certaines féministes (et de certains féminismes) de la sphère publique.

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      • Marianne
        9 avril 2014

        Faut-il inclure ces féminismes dans la sphère médiatique? Si oui, comment peut-on y arriver? Quelles sont les stratégies pour diversifier les messages?

        Par exemple, est-ce qu’avoir des féministes dans des postes décisionnels comme de directrice de la programmation, rédactrice en chef, éditrice, etc, ne peuvent pas changer les choses de l’intérieur? Lentement, mais sûrement?

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  • Guylaine
    9 avril 2014

    Félicitations pour votre initiative.

    Y’en a marre des discours unanimistes et s’il existe plusieurs féminismes, il est logique qu’il y ait débat entre eux et que ce soit pas le fun des fois. Y’en a aussi marre de l’intouchabilité de « nos » vedettes: on ne peut logique débattre de la place qu’occupe une personnalité publique dans les médias sans une certaine part de personnalisation. Personne n’a forcé Léa Clermont-Dion à la pointe du fusil pour qu’elle se donne en spectacle dans le Châtelaine, aux dernières nouvelles, et oui cette pratique est critiquable.

    Non à l’omerta de la fausse unité, et non aux portes-paroles redevables qu’à elles-mêmes. On en sortira plus fortes, en bout de ligne. On assume et on fonce, enfin !

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  • Marie-Pier Long
    9 avril 2014

    Bonjour , j’aimerai avoir ma signature sur cette lettre , car je partage la même opinion et je me considère comme une féministe militante qui dans ma profession j’accompagne et je soutien des femmes vulnérables afin de leur redonner dignité . De plus, je ne suis pas d’accord avec le mouvement du féministe pop / relooker car comme vous je ne crois pas que c’est une voie aidante pour la cause des égalités hommes et femmes . Bravo pour cette lettre !

    Merci d’avance ,

    Marie-Pier Long

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  • AlexH
    9 avril 2014

    « Les médias de masse québécois mettent à l’avant-plan un féminisme de confort et libéral qui porte la voix de femmes blanches, francophones(…) »
    D’accord, mais les signataires de votre texte ne sont pas très diversifiées, au fait. La plupart des noms sont anglais ou français. Ça mérite peut-être une petite remise en question.

    À part ça, le texte est fort intéressant.

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    • Maha Farah El Mir
      9 avril 2014

      Elles peuvent pourtant tout à fait ajouter le mien à la liste: Maha Farah El Mir

      Très bon texte

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    • Fannie B
      9 avril 2014

      Effectivement, nous l’avons réalisé aussi. Mais je crois que la différence se situe dans le fait que les médias font un choix. Quant aux signataires, on offre à qui le veut bien de signer.

      Évidemment, peut-être sommes-nous entourées plus de femmes blanches francophones, mais je tiens à préciser que tout femme voulant ajouter son nom est la bienvenue.

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    • Elisa
      9 avril 2014

      Au sujet de la diversité, il est vrai qu’en regardant tous les noms, la grosse majorité est francophone et semble appartenir à des personnes blanches. Cependant, je crois qu’il est important de mentionner qu’à la base, le texte a été co-rédigé par 5 femmes. Je fais partie de celles-ci et j’aimerais signaler que sur les 5 femmes, 2 d’entre nous (dont moi) s’identifient comme personnes de couleur et/ou personnes racisées. Nous avons d’ailleurs eu une discussion très intéressante au sujet de la façon dont nous nous identifions et sur les 2 termes que je viens d’utiliser (l’un n’implique pas nécessairement l’autre). Nous avons été en charge de rédiger les parties qui parlent d’intersectionalité et d’inclusion/exclusion. Sommes toutes, je dirais que l’expérience de rédaction était parfaitement égalitaire et que nous n’étions aucunement effacées ou bien mises de côté, nous avions plutôt un rôle majeur et quasi-exclusif dans la rédaction des parties traitant d’intersectionalité.

      Le texte a par la suite été révisé/édité/corrigé/annoté par une vingtaine de femmes d’horizons différents (quant à l’orientation sexuelle, aux conditions matérielles et socio-économiques, aux capacités physiques) qui avaient de l’enthousiasme pour le projet mais qui ne pouvaient participer à la rédaction. Elles ont fait un travail collectif en se consultant dans un Google Doc sur chacun des termes, chacune des phrases qu’elles désiraient modifier ou bien chacune des expressions qui les rendaient inconfortables. C’est à ce moment que nous avons constaté que le texte ne faisait pas assez inclusion de certaines formes d’invisibilité, comme par exemple au sujet des capacités physiques, et cela a été corrigé.

      Pour ce qui a trait à l’ensemble des signataires, je ne crois pas qu’il est respectueux envers les concernées d’énumérer les origines ethniques de chacune pour montrer une diversité qui ne transparaît pas dans leurs noms, et je ne veux pas parler au sujet de ces femmes car je ne sais pas comment elles préfèrent être identifiées et si elles veulent que leur orientation sexuelle ou bien leurs capacités physiques soient énumérées en public, mais en survolant la liste (je suis loin de connaître chacune d’entre elles) je reconnais plusieurs femmes d’orientation sexuelle diverses (lesbiennes, bisexuelles) et plus que quelques femmes de couleur/racisées/minorités.

      Bien sûr, il y a toujours de la place pour une plus grande diversité dans chaque mouvement social. Je suis d’ailleurs la première à affirmer que dans certains cercles et groupes (étudiants, politiques, altermondialistes, féministes) il règne parfois une diversité de surface (dans les textes officiels) mais pas en réalité quand on regarde la représentation chez les membres militants.

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    • Naoual Laaroussi
      10 avril 2014

      Ayant écrit cette partie, je crois que mon nom est assez représentatif de la diversité dont nous parlons. 😉

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  • Maha Farah El Mir
    9 avril 2014

    Dans les « E »: mon nom de famille est El Mir

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  • Daphne
    9 avril 2014

    Bien évidemment, le féminisme radical est évacué des médias populaires, comme tout discours qui remet profondément le système en question. On préfère présenter un féminisme pas trop menaçant qui satisfait une certaine grogne que ressentent plusieurs femmes, mais sans trop remettre les fondements du système en question (on a des produits à vendre après tout). Peut-être que certaines féministes pratiquent aussi le ‘compromis patriarcal’ (je fais référence à un autre texte ici qui parlait de ce sujet), se présentant moins radicales qu’elles ne le sont, afin justement d’obtenir une tribune plus grand public. Peut-être cela aurait-il le bienfait de servir de porte d’entrée à certaines qui voudraient approfondir la question (ou, en contrepartie, donner l’illusion que le féminisme s’arrête là)?
    J’aimerais donc savoir, moi qui souhaite approfondir la question: où trouver le discours féministe radical au Québec? Quelqu’un aurait-il des sites/organismes ou autre à me suggérer? Dans l’état actuel des choses, le féminisme radical ne va pas à nous, c’est nous qui devons aller à lui. Comme j’aurais aimé le découvrir plus tôt dans ma vie! Mon espoir est qu’avec les médias sociaux d’aujourd’hui, les prochaines générations auront un accès plus facile à cette parole, la propageront et agiront en conséquence.

    Je suis d’avis que le féminisme doive oser la critique, qui pousse la réflexion. Je ne veux pas d’un mouvement qui marche sur des œufs, qui s’arrête à ‘c’est son choix/son opinion/sa façon de faire et on ne peut rien y redire’. Où tout se vaut et où le mot ‘féminisme’ même ne veut plus rien dire. Pourrait-on parler d’hypersexualisation et illustrer le propos en citant, pour exemple, Miley Cyrus (tout en reconnaissant que ce n’est pas elle qui tire les ficelles), sans se faire accuser de faire du ‘slut-shaming’ par exemple? Il me semble que trop d’attaques défensives non-nécessaires d’une part, trop de censure de l’autre, nuit au débat. Il faut mettre les choses en contexte car c’est dans ce contexte que la critique s’inscrit (et non en attaques personnelles).

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  • Dania
    9 avril 2014

    Ce texte est franchement excellent! Je n’ai rien d’autre à rajouter. Oui, ce texte a été écrit par une majorité de femmes blanches francophones. Pourtant, je suis une femme de « couleur » et je me reconnais complètement dans cette critique féministe. Excellent.

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  • Ines
    10 avril 2014

    Est-ce trop tard pour rajouter mon nom? (Ines Guennaoui)

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  • Chantal Locat
    10 avril 2014

    Excellent. Un texte qui démontre qu’il est essentiel de dépasser la surface et de toujours ramener au premier plan, les racines des oppressions. Et, tant que TOUTES les femmes ne seront pas libres, nous devrons poursuivre LES luttes.
    Je suis tout à fait d’accord avec ce texte. Comme femme blanche, je reconnais que j’ai vécu l’oppression et que malgré tout, j’ai eu et j’ai encore des privilèges par rapport à d’autres femmes, que ce soit par rapport à la classe, à la race ou à l’handicap. Je suis le résultat d’une construction sociale et le genre d’action des journées sans maquillage me pose aussi problème. Cela fait porter sur soi, majoritairement des femmes on s’entend, la capacité de braver la pression sociale patriarcale de la marchandisation de la beauté et du corps féminin. Avec ces journées, à part faire de la sensibilisation, on n’enlève rien aux racines du « soyons belles et taisons-nous! » C’est tout le système social, économique et l’éducation qu’il faut viser. Le maquillage, c’est comme le symptôme, le mal est beaucoup plus profond.

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  • Julie
    12 avril 2014

    Qu’un gars comme Fabien Floszach qui a récemment écrit cet article hyper masculiniste (http://actualites.ca.msn.com/chroniques/la-société-au-féminin) ait écrit sur Nelly Arcan dans l’essai de Léa C-D est tout simplement révoltant (https://twitter.com/Floszach/status/454999409730674688/photo/1). De plus, j’entends sans cesse Léa C-D dire que Nelly Arcand était aliénée. C’est inacceptable. Il faudra critiquer cet essai en bonne et due forme. C’est important.

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  • Elisa
    13 avril 2014

    Les membres du collectif autour de cet article ont maintenant leur site web! http://hyenesenjupons.com/

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  • Martine Maltais-trottier
    22 avril 2014

    Merci pour cette réponse. Vous avez tout dit dans cette phrase;  »Le féminisme mainstream met de l’avant l’égalité entre les femmes et les hommes, mais évince une problématique tout aussi cruciale, sinon plus : l’égalité entre les femmes de différents horizons » Aussi, il ne faut pas juger le couvert d’un livre pour ce qu’il est. Ce n’est pas parce que les noms semblent pour la majorité francophones et anglophones qu’il y a une faible diversification. Mon prénom est le fruit d’un héritage colonial et mon nom de famille est l’union d’un trotteur irlandais avec une amérindienne des Îles de Maltes. Pourtant, en face à face, je suis plus coloré dans les tons de chocolat.

    Martine Maltais-Trottier

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  • Elise
    28 avril 2014

    Excellent texte.
    Si ce n’est pas trop tard, j’aimerais ajouter mon nom à la liste: Elise Dubois.
    Et comme d’autres l’ont souligné, un nom ne dit pas tout. Malgré un nom typiquement blanc francophone, je suis noire (toujours drôle de voir la tête des gens quand je me présente pour une entrevue d’embauche ou autre).

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