« Beauté fatale » sous le regard des drones
Le documentaire « Beauté Fatale » se révèle maladroit du début à la fin, dépourvu de solutions ou d’ouverture réelle sur la problématique de l’obsession de la beauté que peuvent vivre les femmes et surtout, sans avancement nouveau sur la question. Le film a un manque de clarté évident et on a l’impression d’assister à la recherche embryonnaire de Clermont-Dion, au lieu de voir les résultats de cette même recherche. Le synopsis du documentaire nous dit que Clermont-Dion propose de réfléchir sur l’obsession de la beauté. Le documentaire fait exactement le contraire. Elle nous propose plutôt un coup de pèle au visage, physiquement et psychologiquement. Le documentaire nous propose une vision à sens unique qui illustre la problématique comme étant une fatalité : « les femmes sont obsessives face à la beauté. Voilà! En voici les preuves! ». Des « preuves » qui effleurent la surface, qui axent sur les aspects superficiels de la problématique. Le tout, aidé par des entrevues réunissant, pour la presque totalité, de belles femmes issues des milieux entourant la mode, toutes de la même classe économique et pourvues du même point de vue par rapport à la beauté; une vision névrotique et paradoxale. Plusieurs entrevues viennent même à banaliser les injections de botox. Oui, il y a incitation au botox. Combien de femmes dans ce documentaire affirment que le botox est formidable?
Le synopsis du film mentionne également la présence d’experts qui analysent l’enjeu du documentaire. Je cherche encore qui étaient ces fameux experts. Les seuls experts interrogés étaient des chirurgiens esthétiques qui ont eu droit à un petit « pitch » de vente gratis à l’antenne. Tant qu’à moi ce documentaire frôle la propagande, je me permet même de dire qu’il incite les femmes à plonger plus profond dans ce chaos esthétique.
Une esthétique très lichée de l’image vidéo fait en sorte d’appuyer le malaise constant durant l’écoute et d’aller, je crois, à l’opposé de ce qu’a été les intentions initiales. Le montage vidéo est fait de la même façon que les magasines féminins dénigrés dans ce documentaire, prônant de fausses représentations du corps de la femme. Ce film est maquillé dans l’intégral. Le fondement du film devient lui-même une victime face à toute cet esthétisme technique. Un éclairage, une correction de couleur, des mouvements de caméra : tous parfaits. Et… DES DRONES, des caméras robots utilisées normalement pour des plans aériens dans de grosses productions font ici des plans de Clermont-Dion qui court, des plans larges, détachés, lors des conversations émotives avec sa mère. Ce procédé superflu, dans ce cas-ci, nous éloigne de l’essentiel et transforme le tout en fiction, en quelque chose d’impersonnel. Je repense à une scène (l’appellation scène qui réfère encore à de la fiction) où Léa Clermont-Dion arrive chez sa mère, et où une deuxième caméra l’attend sur les lieux afin de capter la réaction cette dernière qui la regarde. Voilà un univers façonné et romancé qui ne dégage aucun naturel. Je dois saluer deux belles interventions dans ce film. Le premier la mère de Léa Clermont-Dion qui représente un beau modèle de femme libérée avec un discours intéressant et critique concernant son rapport à la beauté. Avec les images qui nous sont montrées, on se demande pourquoi Léa Clermont-Dion est en rupture avec sa mère. C’est un paradoxe qui nuit encore à la clarté du documentaire. Merci également à Micheline Lanctôt qui donne un peu d’espoir quant à la possibilité des femmes à avoir un « esprit sain dans un corps sain » parmi la tablée d’actrices au discours défaitiste et sans avenue.
D’autres femmes ont également un beau message comme ces deux femmes qui nous parlent de leurs expériences dans les instituts correctionnels et qui se détachent complètement des autres femmes rencontrées. Mais somme toute, il n’y a aucune entrevue avec monsieur et madame Tout-le-monde. Il faut noter aussi que les seules apparitions d’hommes dans ce documentaire sont celle d’un gars saoul dans un bar et celle d’un chirurgien esthétique.
Il est important de prendre position et c’est pourquoi j’écris ce texte. Le débat nécessite un dialogue constructif et doit nous confronter face à notre responsabilité personnelle. Chaque personne qui détient une quelconque notoriété dans l’espace publique doit en être particulièrement conscient, car la prise de parole est un privilège. Il faut être conscient des impacts de nos actes et nos paroles. De sorte à ne pas travailler seulement pour soi dans une forme narcissique, mais pour la collectivité. « Beauté fatale » est un documentaire maladroit qui, malgré ses bonnes intentions, défend un propos qui cristallise et emprisonne encore la femme dans une victimisation d’elle-même.
J’espère que Léa Clermont-Dion recevra la critique de façon humble, avec ouverture, de façon à ne pas glisser, comme son film, dans le pessimisme. Je lui souhaite alors de se relever les manches afin de nous offrir la prochaine fois, une vraie réflexion.
En 2014, je pense que les femmes doivent se retrouver ensemble et créer un mouvement solidaire qui ne gravite pas autour de névroses communes, ou de blessures personnelles. Il faut se rassembler autour de belles valeurs d’entraide valoriser notre intellect, nos savoirs-faire et notre diversité en proposant des modèles alternatifs et naturels à nos filles, un peu comme l’a fait de belle façon Julie Lambert dans son documentaire « un film de chasse de fille ».
– Franie-Éléonore Bernier
Stephanie
Je suis tout à fait d’accord avec le fait que le documentaire est un peut trop pessimistes et les sujets d’entrevues un peu biaisés .c ´est certains que les filles ds les night-club et les mannequins vont avoir les mêmes opinions que Léa clermont-dion, elles évoluent dans un milieu où la beauté est essentielle et prioritaire.
Je pense en fait que le documentaire est la vision personnel que Léa clermont -Dion entretien avec la beauté. oui elle est guérit de son anorexie mais ,on sent qu’elle fait encore une fixation sur les standard de beauté et qu’elle essait encore de s’y conformer .
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Daphné
Je n’ai pas vu le documentaire, bien que je sois contente que le sujet soit abordé. Je déplore, comme vous semblez le souligner, le manque de vision, d’analyse systémique du problème soulevé (à travers une critique du patriarcat et du capitalisme – comment passer à côté?), et l’ébauche de solution. On semble être resté au niveau d’identifier et nommer la problématique. Désolée, mais rien de nouveau sous le soleil. Je déplore parce que j’ai l’impression qu’on tourne en rond les filles, pire qu’on s’enfonce. On soulevait déjà ces problèmes d’image corporelle chez les filles (pouvant mener à la dépression et aux idées suicidaires) et les troubles alimentaires quand j’étais jeune fille. J’ai lu ‘the beauty myth’ dans la jeune vingtaine. Pour nous mener où? Malheureusement, je constate que la situation semble s’être dégradée à l’ère du photoshop et de l’imagerie pornographique omniprésente.
L’endoctrinement au culte de la beauté commence tôt. Beaucoup de produits/jouets offerts aux fillettes mettent l’accent sur l’apparence, bien définie et homogène. Ce mode de pensée favorise la soumission à l’approbation masculine, chez qui on recherche un signe de notre valeur (accordant à ces messieurs un pouvoir accru sur nos personnes) et la compétition entre filles. Pas très féministe tout cela. L’énergie mentale mise au profit du ‘body monitoring’ et la détresse résultant de ne pas atteindre les standards limités et artificiels auxquels nous sommes sans cesse confrontées mine le bien-être global des filles et la poursuite d’objectifs plus constructifs et épanouissants.
Enfin, il est plus que temps d’aller au-delà du descriptif et de passer en mode solution/action/révolution. À quand un documentaire dédié à voir et entendre des femmes qui ont rejeté ces dictats malsains, réducteurs et sexistes et ont d’autres modèles à offrir?
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Franie-Éléonore Bernier
Merci pour vos commentaires, je suis entièrement d’accord! Il faut se tenir et en parler, courage!
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