À moi aussi…

#MeToo

If all the women who have been sexually harassed or assaulted wrote « Me too » as a status, we might give people a sense of the magnitude of the problem.
Please copy/paste.

#metoo

Je vous lis. Je nous lis. J’ai mal au cœur, j’hésite, je paralyse. J’essaie de penser à autre chose. Et puis, non, trop tard, les larmes montent à mes yeux, merde. J’essaie de respirer calmement. J’ai le cœur sur le bout des lèvres et je le ravale du mieux que je peux. C’est seulement un hashtag, mais je n’y arrive pas. Je regarde ailleurs, fixe un point, tente de me distraire de mon propre cœur qui bat trop fort, à en devenir acouphène. J’aimerais écrire calmement, mais chaque fois, j’ai le cœur qui déborde au bout des doigts. J’ai envie de demander le silence à tout.es celles et ceux qui utilisent le fameux hashtag sur leur mur Facebook et qui permettent au résonnement de mon cœur et à mes peines de cesser. J’ai envie de leur susurrer à l’oreille, du même souffle, de continuer à se faire entendre, parce que ça donne espoir, ça donne du pouvoir. De voir ces femmes et ces hommes victimes d’agressions sexuelles se lever en même temps et témoigner de leur solidarité me laisse pantoise ne sachant que faire entre participer ou observer silencieusement.

Continuer à ignorer le problème, continuer à faire « comme si », à me taire. Parce que parler ce serait admettre que j’ai été vulnérable, alors que c’est bien la dernière chose que je veux être. Parce que ça a toujours sonné à mes oreilles comme « vulvenérable » et que ça me fait regretter mon propre sexe, ma propre identité, ma propre humanité. Parce qu’être « vulvenérable », c’est être désarmée, sans défense, fragile, à nue devant une société qui emprisonne notre vulve, notre corps dans des contraintes « sécuritaires » au lieu de ceux et celles qui nous transgressent avec le leur, avec leurs mots, avec leur attitude.

Et si la seule façon que la société accepte que je puisse crier mon malheur est d’écrire #MeToo sur mon mur…j’ouvre ma brèche, j’ouvre la bouche et je crie à l’unisson avec les voix de milliers d’autres femmes.

On y est encore, comme avec #Agressionnondénoncée. On doit sensibiliser, crier sur notre mur Facebook que ça nous arrive à nous aussi, trop souvent, depuis trop longtemps. Crier avec un seul hashtag commun, à l’unisson de nos cœurs qui battent pour nous faire entendre : pour que la société change. Est-ce que ça marche vraiment de se lever et de parler pour espérer un changement ? Est-ce « trop peu », trop tard ? Est-ce utile d’ouvrir le débat, de dévoiler nos blessures, d’ouvrir notre brèche à tout vent pour le bien de notre société ? Pour ma part, je préfère avoir mal au cœur en l’écrivant plutôt que de ne pas me dévoiler du tout. Je le fais pour moi, parce que crier, parfois, ça soulage. Et si la seule façon que la société accepte que je puisse crier mon malheur est d’écrire #MeToo sur mon mur… j’ouvre ma brèche, j’ouvre la bouche et je crie à l’unisson avec les voix de milliers d’autres femmes, d’hommes, de personnes survivantes à la culture du viol. Parce que, parfois, à force d’ignorer notre propre souffrance, on perpétue la culture qui nous blesse, ne crois-tu pas?

Et puis voilà. Après trois heures de pleurs, du bout de mes lèvres, je susurre « ça m’est arrivé à moi aussi ». À celles et ceux qui ont la force d’en dire plus, bravo. Je vous félicite d’avoir le courage de vous mettre à nue. Vous me donnez le courage de libérer ma « vulvenérabilité » des contraintes que je lui impose et qui perpétuent cette culture du viol. #MeToo

 

Catrine Beauséjour

 

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