Petite expérience, pas du tout scientifique, sur la construction des genres

2583389433_c66fbee59a_bJ’ai toujours été assez sceptique par rapport aux phrases qui débutent avec « les petites filles sont comme ci » ou « les petits garçons sont comme ça ». Et je me suis longtemps fait répondre : « Tu vas voir quand t’auras des enfants, tu vas comprendre ». Et bien quelle chance, j’en ai maintenant deux! Et j’ai même un représentant de chacune des deux catégories sus mentionnées. Je suis donc maintenant autorisée à avoir, moi aussi, une opinion sur les différences garçon-fille. En contrepartie, tout le monde veut maintenant me faire part de son avis sur la question, ou plutôt avoir mon approbation concernant leurs théories sur les différences entre petits garçons et petites filles. Et depuis cinq ans, j’ai à peu près tout entendu : que mon coco, ça parait que c’est un garçon car il ne tient pas en place, que ma cocotte, c’t’une vraie fille (lire ici qu’elle est coquette) ainsi que de longues et étranges explications sur pourquoi ma relation avec mon garçon (ou avec ma fille, selon l’interlocuteur) est par définition plus intense, plus intime, plus solide, etc.

À la base, mon opinion est plutôt du type : j’ai deux enfants, différents, avec chacun leurs goûts, leurs intérêts, leurs personnalités. Essayons de les aider à grandir et à se développer dans la mesure de nos capacités. N’empêche que je sais bien qu’un enfant n’est pas imperméable aux pressions de son environnement et que les miens ne grandissent pas dans une tour de verre. C’est pourquoi, pendant le temps des fêtes, j’ai eu envie de mener une petite expérience, sans aucune valeur scientifique mais tout de même éclairante.

Comme la fin de décembre est une période toujours riche en partys, avec la famille comme avec les amis, j’ai eu envie de noter les compliments reçus par mes enfants. Bien sûr, je n’ai pas pu entendre tout ce qui s’est dit dans toutes les occasions mais j’ai tenté d’être la plus attentive possible et de systématiquement prendre des notes après chaque évènement. J’ai ensuite divisé les compliments reçus en trois catégories :

1)  Ceux qui concernent uniquement l’apparence. J’inclus ici les commentaires sur les attributs purement physiques (yeux, cheveux, sourire, etc.) mais aussi les vêtements, les souliers et les accessoires.

2)  Ceux qui concernent les habiletés intellectuelles. Dans cette catégorie, on trouve un peu de tout « Tu parles dont ben bien », « T’es vraiment bonne pour faire des casse-têtes » ou  «  Quel beau dessin! c’est toi qui a fait ça? »

3)  Ceux qui concernent les habiletés physiques. Qu’ils courent vite, sautent haut, soient fort où capables de faire des belles pirouettes.

Les résultats parlent d’eux même:

Pour ma fille

  • Apparence: 47 compliments
  • Habiletés intellectuelles: 10 compliments
  • Habiletés physiques: 7 compliments

Pour mon garçon

  • Apparence: 11 compliments
  • Habiletés intellectuelles: 13 compliments
  • Habiletés physiques: 10 compliments

Si du côté des habilités intellectuelles et physiques les compliments sont grosso modo aussi nombreux, pour l’apparence physique ma fille a reçu plus de quatre fois plus de compliments que mon garçon! Avant de faire l’expérience, je me doutais bien que ma fille allait recevoir plus de commentaires concernant ses vêtements, ses cheveux, etc. mais jamais je n’aurais pensé que la tendance allait être si lourde! Dès lors, comment déterminer que ma fille est vraiment coquette par nature et non qu’à force de se faire complimenter presque deux fois plus souvent sur son apparence que sur les autres aspects de sa personnalité elle n’en vient pas à penser que c’est là que réside sa principale valeur? Quelle est la cause et quel est l’effet?

Bien sûr, je passe ici sous silence la quantité de jouets de fille ou de garçon reçue encore une fois cette année. Tout comme je ne vous parle pas des regards mi-amusé, mi-réprobateur, posés sur mon fils lorsqu’il s’amuse avec les robes de princesse de sa soeur, regards que ma fille ne reçoit jamais si elle porte le costume de cowboy de son grand frère.

Pourtant, tous les gens que j’ai vu dans le temps des fêtes sont des gens brillants, éduqués que j’aime et je respecte. Je suis convaincu qu’ils croient tous profondément à l’égalité entre les hommes et les femmes et qu’ils n’ont pas du tout conscience du biais de leur commentaires. D’ailleurs ce qui m’a peut-être le plus surpris dans ce projet, c’est de prendre conscience de mes propres biais lorsque je m’adresse à mes nièces, mes neveu ou aux enfants de mes amis. Si quelqu’un d’autre avait mené la même expérience sur moi, je ne suis pas du tout certaine que j’aurais mieux fait que les autres.

Et vous, comment faites-vous pour préserver vos enfants de la pression sociale d’agir en gars ou en fille? Faut-il en arriver à des solutions extrêmes comme ici?

Par Clémence Lamarche

5 Comments

  • F
    29 janvier 2014

    Comment savoir si la différence constatée entre les chiffres n’est pas consécutive à d’autres références qu’au genre de l’enfant. Une question d’âge entre les 2, peut-être que l’un est plus sociale que l’autre et les compliments fusent plus facilement lors d’un câlin, peut-être que les cheveux de votre fille sont plus beau que ceux de votre garçon ce qui explique pourquoi elle a eu plus de « tu as de beaux cheveux! » par ex…Mais je pensais tout de même que les compliments se démarqueraient plus au sujet de l’intellect ou des habiletés physiques. Est-ce que l’on glorifie la coquetterie de la fille ou plutôt que l’on ne serait pas assez attentif au physique du garçon?

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  • Abd Salam
    29 janvier 2014

    Comment savoir si la différence constatée entre ls chiffres n’est pas consécutive à d’autres références qu’au genre ?

    Suffit d’ouvrir les yeux et les oreilles, observez donc autour de vous les comportements à l’égard des femmes/filles et des hommes/garçons.
    Vous vous rendrez compte assez rapidement que pour les femmes, ça tourne toujours autour de l’apparence, quel que soit le contexte.

    Regardez bien, même dans le contexte professionnel, on va se sentir obligé de préciser qu’une femme est belle.

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  • Claire
    30 janvier 2014

    J’ai beaucoup aimé votre article.
    Je veux simplement rajouter que, surtout lors des partys de Noël, les filles sont effectivement bien coiffées et vêtues.
    Ayant moi même 3 garçons, le plus fancy que l’on me permet de faire est une chemise à la place d’un t-shirt… et si j’ose vouloir faire quelque chose aux cheveux on me regarde d’un air désespéré. Alors il est évident que l’on ne fera aucun commentaire sur leur apparence, à moins que ce soit l’habituel « oh mon Dieu t’as dont ben grandi »
    Lorsque je rencontre des nièces ou autres filles je m’efforce de ne pas faire de commentaires sur leur apparence et je tente désespérémment de trouver une autre source de compliments. Mais quand on me regarde avec les yeux pétillants en montrant la petite sacoche qui s’agence avec les chaussures… c’est difficile de ne pas passer un commentaire rapide pour la rassurer.
    Sur un même ordre d’idée, cette année le père Noël a amener des barbies à mes garçons et à ma grande surprise j’ai eu droit à 2 sessions de 30 minutes très calme à la maison… pourquoi? 2 des garçons étaient entrain d’apprendre à brosser les cheveux des barbies. Très intéressant à voir!

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  • Marianne
    10 février 2014

    Ça me rappelle cet article sur les sujets qu’on aborde lors d’une discussion avec une petite fille:

    « Try this the next time you meet a little girl. She may be surprised and unsure at first, because few ask her about her mind, but be patient and stick with it. Ask her what she’s reading. What does she like and dislike, and why? »

    http://www.huffingtonpost.com/lisa-bloom/how-to-talk-to-little-gir_b_882510.html

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