5 mythes sur l’écriture inclusive

 

En suivant l’actualité, je constate qu’il y a encore beaucoup de confusion entre les différentes manières de négocier les genres dans la langue française. Que les personnes soient mal intentionnées ou mal informées, le résultat reste le même : on mélange tout et ce sont les personnes de genres non binaires et féminins qui en souffrent. Il reste beaucoup de travail d’éducation à faire pour déconstruire les mythes tenaces sur l’écriture inclusive. Voici 5 mythes qui reviennent inlassablement dans les discours et qui perpétuent des violences symboliques et réelles.

 

  1. La langue française est neutre. Rien de plus faux. Le masculin l’emporte encore sur le féminin et est considéré comme une espèce de pseudo universel neutre qui engloberait tous les genres. Exemple : 100 femmes et un cadavre = ils. Je pense qu’il faudrait arrêter de se leurrer et nommer la langue française normative pour ce qu’elle est : une langue masculine, genrée et accordée au masculin par défaut. Si la résistance envers l’écriture inclusive est si grande, on pourrait dire que c’est parce que le boys club de la langue française tient mordicus à garder ses privilèges de genre jusque dans les accords, la manière de nommer et d’incarner les réalités du monde dans lequel on vit.

 

  1. Les personnes non binaires veulent annuler tous les genres. C’est une affirmation de mauvaise foi et de mépris que je lis souvent chez les chroniqueur-e-s d’opinion du Journal de Montréal, pour ne pas les nommer. Les personnes non binaires ne veulent pas détruire les hommes et les femmes cis. Il s’agit plutôt d’inclure tous les genres dans la langue française : à la fois de conserver le masculin et le féminin et d’ajouter les genres non binaires, agenres et autres quand la situation s’y prête. Par exemple, pour genrer correctement un groupe de personnes aux genres multiples ou des personnes dont on ne connait pas les pronoms préférés. L’écriture inclusive vise donc la multiplication des genres dans la langue plutôt que leur destruction.

 

  1. L’écriture inclusive et non binaire, c’est la même affaire. Pourtant, ce sont deux types d’écritures avec des enjeux et des conjugaisons totalement différentes. L’écriture inclusive le dit, elle veut inclure toutes les identités de genres dans ses conjugaisons et refuse d’utiliser le masculin comme universel. L’écriture non binaire sert à genrer exclusivement les personnes non binaires. Dire que l’écriture inclusive est non binaire ou vice versa, c’est invisibiliser la langue des personnes non binaires et leur refuser une visibilité spécifique qui leur est propre. De la même façon, les revendications pour la féminisation des noms de métiers et autres mots servent à révéler l’existence spécifique des femmes (et du spectre des genres reliés au féminin) dans la langue et le monde. À noter qu’il existe plusieurs manières différentes de conjuguer et de nommer les personnes non binaires. La meilleure manière de le savoir est de demander poliment à la personne quels sont ses pronoms préférés et comment iel préfère être conjugué-e.

 

  1. L’écriture épicène est non genrée. Pas nécessairement. C’est un sujet délicat, mais il existe des personnes agenres (qui n’ont pas de genres) et c’est une identité de genre autant valide que les autres. C’est important de distinguer entre l’épicène (la tentative de neutraliser, d’enlever toute marque de genre dans la langue, si c’est possible) vs une écriture non binaire agenre (non genrée en tant qu’identité spécifique). Certaines écrivaines féministes comme Monique Wittig ont écrit des romans complets en épicène, ce qui s’inscrivait dans le projet féministe radical d’abolir tous les genres afin de détruire la suprématie du genre masculin sur le genre féminin (et les autres genres, mais je doute qu’elle ait us cela à l’époque). À noter que ce projet a été critiqué pour ses biais cis voire transphobes puisque de vouloir abolir tous les genres, c’est ne pas reconnaître l’importance de l’auto-identification, la reconnaissance sociale et les ressentis des personnes trans. On pense qu’on peut abolir les genres parce qu’on possède un privilège cis et qu’on ne voit plus à quel point cela vient avec un confort, une sécurité et des avantages sociaux.

 

  1. L’écriture inclusive, c’est compliqué. Je dirais que c’est compliqué de bien écrire en français et de ne pas faire de fautes d’orthographe et qu’il y a bel et bien un privilège de classe sociale et d’éducation relié à la maîtrise parfaite du français. Malheureusement, même chez les personnes plus éduquées, peu d’efforts sont faits pour apprendre comment écrire en français inclusif et encore moins en français non binaire. Pourtant, il suffit d’à peine 30 minutes de sa vie afin de lire l’un des nombreux guides qui existent sur le sujet pour comprendre les rudiments et pouvoir ensuite se débrouiller là-dedans. Il ne faut pas avoir peur de faire des erreurs, l’important est de faire l’effort intellectuel, faire preuve de bonne foi et d’être capable de s’excuser en cas d’erreur. En bonus (fun fact) : à ma connaissance, il y a beaucoup de personnes trans non binaires qui se genrent iel-mêmes en français inclusif (plutôt qu’en français non binaire). Pourquoi? Parce que c’est plus facile à apprendre (pour soi et les autres), que c’est un amalgame entre des accords masculins et féminins (ce qui représente la réalité de bien des personnes non binaires qui se retrouvent quelque part là-dedans), que c’est plus répandu et que ça sonne bien à l’oral.

 

En guise de conclusion, le choix des mots est important afin d’intégrer et respecter les réalités trans non binaires et la diversité des genres. Si vous possédez un privilège cis, il y a plusieurs choses que vous pouvez faire pour aider les communautés trans : bien apprendre les différences entre l’écriture inclusive, l’écriture non binaire, l’écriture épicène, l’écriture masculine (normative), l’enseigner à vos proches afin de réduire la charge mentale des personnes trans qui doivent se taper infiniment le même travail d’éducation, et finalement, apprendre les bases de l’écriture inclusive. Ce sont des marques de respect fortement appréciées et qui changent positivement la vie de nos communautés.

 

Pour aller plus loin

 

Manuel d’écriture inclusive simple à télécharger en PDF : https://www.ecriture-inclusive.fr/.

 

Petit dico de française neutre/inclusif : https://lavieenqueer.wordpress.com/2018/07/26/petit-dico-de-francais-neutre-inclusif/.

 

Règles de grammaire neutre et inclusive : https://divergenres.wordpress.com/regles-de-grammaire-neutre-et-inclusive/.

 

Dictionnaire critique du sexisme linguistique : http://editionssommetoute.com/Livre/dictionnaire-critique-du-sexisme-linguistique.

7 Comments

  • 4 mai 2019

    Bonjour!
    je découvre ce blog à la faveur de recherche de nouveauté via wordpress, et je ne suis pas déçue 🙂 Au plaisir d’échanger sur des questions d’inclusivité et de féminisme !

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  • Grammaire
    7 mai 2019

    Quel ramassis de conneries! La règle est simple: le masculin l’emporte sur le féminin. Il faut l’appliquer ou retourner à l’école!

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  • Yvy
    12 mai 2019

    C’est bien gentil d’être transphobe et sexiste, (hrmmm hrmmm) mais si au moins tu pouvais ne pas en faire « profiter » le reste du monde, et arrêter de juger aussi violemment (je cite « ramassis de conneries ») parce que, tu vois, il existe des gens qui veulent changer les choses, pour que tout le monde puisse vivre librement.
    Enfin, si tu veux que je retourne à l’école à cause de mon genre, c’est que tu es complètement à côté de la plaque. D’ailleurs, ça m’intéresse, tu as lu cet article pour quoi ? (c’est une question sérieuse, ça m’intéresse réellement.)

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  • ChrisBaroque
    6 novembre 2020

    L’écriture inclusive ne fait que rendre l’accès à la langue française encore plus compliqué. Quand je dis « la table et le tabouret sont bien construits », est-ce que je mets tabouret au dessus de la table ?? Non. Et le rajout du « iel » est surréaliste. Il faut tout faire pour éviter ça.

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  • Fidu
    10 mars 2021
  • Aye Yayaye
    19 avril 2021

    Le plus épouvantable, c’est que des gens dans votre genre réussissent à s’accaparer les postes d’autorité de la société québécoise et ainsi imposer leurs lubies au reste de la population.

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  • Dominique Locas
    10 septembre 2023

    « Malheureusement, même chez les personnes plus éduquées, peu d’efforts sont faits pour apprendre comment écrire en français inclusif et encore moins en français non binaire. » — C’est probablement parce que ces gens instruits ont fréquenté l’université à l’époque, pas si lointaine, où l’on parlait beaucoup plus de liberté d’expression et de démocratie que des règles d’accord. À l’université, j’ai surtout appris à me méfier des gens qui tentent une prise de contrôle de la langue.

    Personne n’a moralement, encore moins légalement le droit de dire aux autres comment écrire ou comment ne pas écrire. La langue appartient à tout le monde. On apprend le français à l’école dès l’âge de cinq ou six ans. Dans mon cas, mon acquisition des bases du français écrit remonte aux alentours de 1980. Je suis traducteur spécialisé en juridique, et j’ai fait de longues études universitaires.

    Ce que vous exigez des gens va (beaucoup) trop loin. Vous touchez à des règles d’usage qui sont aux fondements même de la langue. Vous dites aux gens, « allez lire telle ou telle brochure ; ça ne prendra qu’une demi-heure de votre vie » … et changez votre façon d’écrire. Rien que ça! Au nom de quoi devrais-je vous obéir? Le ton directif dont vous usez ne m’inspire que de la méfiance envers ceux qui tiennent ce genre de discours.

    En plus, la qualité de votre français laisse place à l’amélioration. Il me semble que « iels-mêmes » devrait s’accorder au pluriel, non? Ou faudrait-il écrire « iel-le-s-mêmes »? Désolé de mal comprendre. Je suis francophone, et non inclusivophone.

    Je préfèrerais encore n’écrire qu’en anglais plutôt que de me mettre à cette écriture dite « inclusive ». Je pense qu’on devrait plutôt parler d’une écriture « divisive » puisqu’elle divise les mots comme les gens. C’est surtout une belle pomme de discorde.

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